David Dickens : CirkAfrica 2024, un voyage époustouflant au cœur de l’Éthiopie

Dans cette interview exclusive, David Dickens dévoile l’âme de CirkAfrica 2024 : un hommage vibrant à l’Éthiopie et au cirque africain authentique.

CirkAfrica 2024 : Authenticité et traditions africaines au rendez-vous

Nofi : Alors David bonjour. CirkAfrica revient en 2024 avec une édition encore plus ambitieuse. Comment résumez-vous ce spectacle pour quelqu’un qui le découvre pour la première fois ?

David : Mais je crois justement… J’ai coutume de dire que c’est une manière de voyager sans quitter Paris et de découvrir l’Afrique, notamment l’Éthiopie cette année. C’est un spectacle qui permet de parcourir le folklore éthiopien sans jamais folkloriser, sans jamais céder à la facilité. C’est vraiment permettre au plus grand nombre de découvrir l’Éthiopie et les qualités acrobatiques exceptionnelles de ces athlètes.

Nofi : Quand vous dites « sans jamais céder à la facilité« , c’est-à-dire ?

David : C’est-à-dire qu’on n’est pas dans le petit boubou, les djembés, des choses un petit peu typiques comme ça qu’on a tendance à réunir pour vulgariser ce que peut être l’Afrique. Là, on fait quelque chose qui est authentique. On travaille avec des artistes éthiopiens, avec des artisans éthiopiens, avec un souci de l’authenticité, de la véracité. Tout ce que vous allez voir, ce sont des choses qui sont inspirées des traditions ancestrales.

Nofi : En quoi, pour vous, c’est important, cette mission ? Pourquoi le cirque, et pourquoi par le cirque, cette volonté de transmettre, on va dire, la culture africaine ?

David Dickens : CirkAfrica 2024, un voyage époustouflant au cœur de l’Éthiopie

David : Je vais vous donner un exemple très concret pour dire notre objectif. Dans le spectacle, il y a un numéro d’échasses. Les échasses, on sait que dans certaines cultures africaines, elles servent à des rites, elles servent dans des balais. Mais on sait aussi qu’autrefois, dans les tribus, elles permettaient de voir à travers le feuillage des arbres les ennemis au loin ou les prédateurs qui risquaient d’attaquer les camps. Aujourd’hui, les échasses sont utilisées comme un agrès acrobatique au cirque. Ça permet à la fois de faire du divertissement, mais en se fondant sur quelque chose d’authentique, qui a existé, et qui raconte notre histoire. C’est ce que l’on veut faire avec tous les numéros du spectacle. Les bassines : on sait très bien l’importance des bassines dans la culture afro-caribéenne. En Chine, on jongle avec des massues, en Russie avec des quilles, en Afrique, on jongle avec des bassines. Et là encore, on raconte l’histoire importante de la bassine, qui permet aux femmes d’aller chercher l’eau, qui est très présente dans la culture afro-caribéenne. On a créé un répertoire acrobatique africain avec des choses qui nous appartiennent véritablement. Et ce répertoire, aujourd’hui, il est en train de faire la nique au cirque de Moscou, au cirque russe, et au cirque de Pékin, le cirque chinois.

Nofi : Le cirque traditionnel a souvent été critiqué pour l’utilisation d’animaux. Comment Cirque Africa s’inscrit-il dans une démarche plus éthique ?

David : Il y a un certain paradoxe à ce que, non, on ne trouve pas d’animaux dans un cirque africain, alors qu’on trouve des animaux de la savane africaine dans absolument tous les autres cirques traditionnels. On n’en a pas besoin. On n’en a pas besoin pour plusieurs raisons. Pour des raisons clairement éthiques. Aujourd’hui, les jeunes qui viennent au cirque sont vos enfants, sont les miens, ce sont des jeunes qui ont une vraie conscience écologique et qui ont la possibilité de voir des animaux dans leur environnement naturel, sur internet ou en voyageant, d’une part. Et ensuite, nous, ça nous a permis, avec des artisans africains, éthiopiens en l’occurrence cette année, de créer des marionnettes géantes à l’effigie d’animaux, avec des masques africains, qui permettent de remplacer le rôle qu’avaient les animaux au sein d’un spectacle de cirque par le passé. Parce que ça appartient à une histoire ancienne de montrer des lions, des tigres, des éléphants au cirque. Et aujourd’hui, les enfants ont envie de voir autre chose. Il est de notre responsabilité de leur fournir autre chose.

David Dickens : CirkAfrica 2024, un voyage époustouflant au cœur de l’Éthiopie

Nofi : Quel message espérez-vous transmettre au public à travers cette nouvelle édition ?

David : L’idée, c’est que vraiment, avec ce spectacle éthiopien, il y a quelque chose de singulier. Vous le savez comme moi, l’Éthiopie a une culture qui est unique en Afrique. On sait que, par exemple, le christianisme est apparu en Éthiopie au 4e siècle, alors que l’islam est arrivé au 7e siècle. On sait que la population est à 45 %, je crois, de moins de 15 ans, à 67 % de moins de 25 ans. Donc, c’est une population jeune. On sait que c’est le 2e pays de l’Afrique en termes de densité de population, donc avec des perspectives absolument immenses. On sait aussi qu’au sein d’une même famille, vous pouvez trouver une mère musulmane, un père orthodoxe. C’est quelque chose que l’on ne trouve absolument nulle part. Il y a un respect d’autrui qui est quelque chose de singulier. Et donc, ce qu’on espère, c’est que ce rythme-là d’humanisme qu’on trouve uniquement en Éthiopie, on puisse le faire partager à travers un divertissement. Et pas n’importe quel divertissement. Parce que voilà, ce n’est pas un prétexte, c’est du cirque de très haut niveau. Ce que vous allez voir là, au Cirque Phénix, avec CirkAfrica, c’est quelque chose que vous ne verrez nulle part ailleurs. C’est des sauts périlleux absolument incroyables, avec des réceptions qu’on ne voit nulle part. Il y a un des numéros qui a gagné un prix au Festival Mondial du Cirque de Demain. Je crois qu’il a gagné la médaille d’or. Le Festival Mondial du Cirque de Demain, ce sont les Jeux olympiques du cirque. Donc, ce que vous allez voir, c’est la quintessence de ce qu’est le cirque africain aujourd’hui, et ce qu’il représente dans le monde du cirque. C’est vraiment ce qu’on a voulu faire. C’est un spectacle qui est offert à tout le monde, qui est proposé à tout le monde, mais vraiment qui a aussi un rôle de représentativité pour montrer le répertoire acrobatique africain et, à travers cela, notre culture.

Nofi : 300 000 billets vendus, c’est exceptionnel.

David : C’est exceptionnel, oui. Comme je vous disais, il n’y a pas grande production qui arrive à faire ce genre de chiffres, et on est très fiers de ça. Alors, c’est vrai que moi, j’ai des budgets marketing qui me permettent de faire connaître le spectacle. Et puis, on a une esthétique, une esthétique qui est assez universelle, qui parle à tout le monde. Et je pense que ça, ça joue aussi. Ça participe du succès qu’on a et de l’envie des gens de découvrir ce spectacle.Notre Cirque Afrique, c’est un visage pour le cirque africain : c’est toujours un visage noir, un visage de garçon ou un visage de femme. Quand vous passez en voiture devant une colonne Morris et que vous voyez ce visage noir, vous ne savez pas ce qu’il raconte. Vous êtes interpellé par la beauté physique et esthétique de ce visage. Vous ne savez pas si c’est un film, une pièce de théâtre, une comédie musicale. Nous, ce qu’on veut, c’est juste attirer votre œil, susciter votre attention pour vous emmener sur notre site internet. Et là, vous comprenez pour que vous puissiez venir découvrir ce que l’on vous propose. Et apparemment, cette politique marketing, ce process-là fonctionne.

David Dickens : CirkAfrica 2024, un voyage époustouflant au cœur de l’Éthiopie

Nofi : Qui êtes-vous, monsieur ?

David : David Dickens. Moi, je suis un communicant. Donc, c’est très rare que les communicants apparaissent. En général, vous ne me verrez sur aucun document qui appartient à la société. Je le fais uniquement pour les médias afro-caribéens parce que je pense qu’effectivement, on a une responsabilité de représentativité, d’explication du discours, de nos objectifs, des projets que l’on nourrit. Et c’est la raison pour laquelle j’apparais. Sinon, moi, je viens d’une famille tout à fait ordinaire, un passionné de culture noire qui a eu la chance de découvrir des illustres personnalités. Parce que le fait d’être senior m’a permis, dans les années 80-90, de croiser des personnes comme Gordon Parks, sa fille Toni Parks, ou encore Arthur Ashe et Spike Lee. Voilà, ce sont des gens qui ont nourri ma culture noire et qui, à mon retour ici, m’ont fait apprécier ma francité de manière différente. Aujourd’hui, moi, je n’ai aucun problème avec les gens qui peuvent nier ma francité au seul motif de ma couleur de peau ou m’attribuer des qualités ou des défauts pour cette même raison. Je vois ça de très, très haut, à un moment donné, avec vertige, et je n’éprouve que du mépris pour ces gens-là. Je pense qu’on n’a pas de temps à perdre avec ça. Notre responsabilité, en tant que parents, en tant qu’adultes, c’est de mettre en avant notre culture et de faire en sorte que, demain, nos enfants puissent bénéficier de cela, de savoir d’où ils viennent pour pouvoir savoir où ils doivent aller.

David Dickens : CirkAfrica 2024, un voyage époustouflant au cœur de l’Éthiopie

Nofi : Est-ce que vous pouvez dire un dernier mot à la communauté noire et fière qui nous suit, et qui, je pense, doit être très intéressée par ce cirque africain ? Qu’est-ce que vous pouvez leur dire pour leur donner envie ?

David : Bah, on n’a pas vraiment de différence entre eux et moi. Je suis aussi un fervent admirateur du travail de Nofi. Vraiment, bravo à toutes les équipes pour ce que vous faites, c’est très important. Les projets que vous nourrissez sont extraordinaires, et j’aimerais en prendre ma part si c’était possible. Tout ce que je peux dire, c’est que vous allez passer un excellent moment, découvrir des choses qui appartiennent à un répertoire tribal adapté au cirque, avec un répertoire acrobatique spécifique africain. Je sais que nous, on n’a pas une culture circassienne. Moi, je n’allais pas au cirque quand j’étais enfant, mes parents ne m’emmenaient pas au cirque. Mais là, véritablement, on a la possibilité de découvrir des choses qui nous appartiennent, qui font partie de notre culture. Et je pense que c’est une occasion unique, rêvée, de passer un bon moment avec un orchestre live, des musiciens extraordinaires, des chanteurs, des chanteuses, et ces acrobates prodigieux qui viennent tous d’Éthiopie. Ce sont tous des artistes noirs, et je vous encourage à venir découvrir ce qu’on est capables de faire.

Nofi : Merci beaucoup.

David : Merci à vous.

David Dickens : CirkAfrica 2024, un voyage époustouflant au cœur de l’Éthiopie

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Mathieu N'DIAYE
Mathieu N'DIAYE
Mathieu N’Diaye, aussi connu sous le pseudonyme de Makandal, est un écrivain et journaliste spécialisé dans l’anthropologie et l’héritage africain. Il a publié "Histoire et Culture Noire : les premières miscellanées panafricaines", une anthologie des trésors culturels africains. N’Diaye travaille à promouvoir la culture noire à travers ses contributions à Nofi et Negus Journal.

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