Francisco Macías Nguema est un nom qui évoque le cauchemar, la terreur et la folie dans l’histoire de la Guinée équatoriale. Cet ancien fonctionnaire banal, devenu le premier préFrancisco Macías Nguema est un nom gravé dans l’histoire de la Guinée équatoriale comme celui du « dictateur fou ». Ce premier président du pays, élu en 1968 lors de l’indépendance de l’ancienne colonie espagnole, a rapidement plongé son peuple dans une dictature brutale où la peur et la violence régnaient en maîtres.
Francisco Macías Nguema ou l’ascension d’un dictateur
À travers cet article, Nofi vous plonge dans l’histoire incroyable, presque impensable, d’un homme qui a mené son pays dans une spirale de terreur et de folie. Un homme qui a dirigé l’un des régimes les plus brutaux du 20ᵉ siècle en Afrique. Un homme qui n’a pas hésité à utiliser les pires méthodes pour maintenir son pouvoir. Cet homme, c’est Francisco Macías Nguema, le dictateur fou de Guinée équatoriale.
Notre histoire commence en 1924, dans un petit village de Guinée équatoriale, une colonie espagnole à cette époque. Francisco Macías Nguema est né dans une famille modeste, dans une société encore marquée par la dureté du régime colonial. Dès son plus jeune âge, il montre une intelligence vive, mais aussi un tempérament particulier, un goût pour le pouvoir, pour l’autorité, et une profonde méfiance envers ceux qui l’entourent. Il fait des études, devient fonctionnaire de l’administration coloniale, et se fait rapidement remarquer. Ses méthodes sont brutales, parfois sournoises, mais efficaces.
En 1968, la Guinée équatoriale est sur le point d’obtenir son indépendance, et Nguema, avec son charisme, émerge comme l’un des principaux acteurs politiques du pays. Lors de la première élection présidentielle, il s’engage dans une campagne intense et nationaliste. Avec un discours rempli de haine contre les colonisateurs espagnols, il promet au peuple un avenir où la Guinée équatoriale serait libre et prospère. Ses promesses résonnent auprès de la population, qui voit en lui un symbole de la lutte contre l’oppresseur.
Alors que tout semble indiquer une course électorale loyale, Nguema ne peut s’empêcher de se débarrasser de ses rivaux potentiels. Son principal adversaire, Bonifacio Ondó Edu, est accusé de conspiration. Une conspiration montée de toutes pièces, bien entendu, mais qui est suffisante pour justifier son arrestation. Ondó Edu disparaît mystérieusement, sans qu’aucune enquête ne soit jamais ouverte. Une fois ce rival écarté, Nguema gagne facilement les élections et devient le premier président de la Guinée équatoriale indépendante.
Mais ce qui aurait dû être le début d’une nouvelle ère pour ce jeune pays va rapidement se transformer en cauchemar. Car, une fois au pouvoir, Nguema ne tarde pas à révéler sa vraie nature. Son régime, au lieu d’être celui de la liberté et de la prospérité, se transforme en une dictature terrifiante.
À peine quelques mois après son élection, Nguema met en place un système répressif sans précédent. Les voix critiques, les opposants politiques, les intellectuels, tous ceux qui pourraient contester son autorité sont méthodiquement éliminés. Il crée une police secrète, les Jóvenes Antiguos de Macías (ou JAM), composée de jeunes qu’il forme à obéir aveuglément. Cette milice devient le bras armé de sa répression, infiltrant les quartiers, les villages, surveillant et dénonçant tout ce qui pourrait sembler déviant ou réfractaire.
Il se donne alors des titres pompeux, se déclare « président à vie », « chef suprême » et même « Miracle unique », comme s’il se voyait comme un être envoyé par une force supérieure pour diriger son peuple. Ses discours deviennent de plus en plus inquiétants, et sa paranoïa s’intensifie. Nguema est obsédé par l’idée que des complots se forment partout contre lui. Il voit des ennemis invisibles, des traîtres dans chaque ombre.
C’est alors que commence une série de purges violentes. Il envoie ses hommes arrêter d’anciens collaborateurs, des amis, parfois même des membres de sa famille. La moindre critique est perçue comme une menace, le moindre murmure peut mener à une arrestation, et souvent à une exécution sans procès. La célèbre prison de Black Beach devient un centre de torture et de détention où des centaines de personnes sont enfermées dans des conditions inhumaines. Les détenus y subissent les pires sévices, et rares sont ceux qui en sortent vivants.
Mais Nguema ne s’arrête pas là. Sa folie va encore plus loin, jusqu’à lui faire prendre des décisions qui plongent la Guinée équatoriale dans le chaos économique. Convaincu que les intellectuels et les élites culturelles menacent son pouvoir, il décide de les éradiquer. Les écoles sont fermées, les enseignants emprisonnés ou exécutés, les livres brûlés. Il accuse les docteurs de propager des idées « anti-patriotiques » et les force à quitter le pays, jusqu’à ce qu’il ne reste plus que deux médecins pour tout le pays. La Guinée équatoriale sombre alors dans une crise sanitaire désastreuse.
Nguema ordonne aussi l’expropriation des entreprises étrangères, principalement celles des Espagnols. Il confisque leurs biens et en attribue la gestion à ses proches, qui n’ont ni les compétences ni l’expérience pour les faire prospérer. En conséquence, l’économie du pays s’effondre. Les plantations de cacao, autrefois prospères, sont abandonnées, et la Guinée équatoriale, qui exportait autrefois cette précieuse ressource, devient incapable de se nourrir elle-même. La famine s’installe, mais Nguema n’en a que faire.
Son goût pour l’absurde et le macabre culmine en 1969, lors d’un événement qui restera tristement célèbre sous le nom de massacre de Noël. Ce jour-là, dans le stade de Malabo, 150 prisonniers politiques sont rassemblés sous les yeux d’une foule effrayée. Les soldats de la JAM, déguisés en Pères Noël, ouvrent le feu, exterminant tous ceux qui avaient été désignés comme « ennemis de la nation ». Ce massacre public est un message clair : nul n’est à l’abri, et toute opposition sera écrasée dans le sang.
L’histoire pourrait s’arrêter là, mais la folie de Nguema semble sans limites. Sa paranoïa atteint des sommets hallucinants. Il ordonne la fermeture de la capitale à tout citoyen ne faisant pas partie de son cercle restreint et s’entoure d’un mur de gardes, de fidèles, et de pratiques occultes. Convaincu qu’il doit assurer sa domination par la magie, il s’entoure de crânes et de reliques humaines, croyant qu’il peut absorber la puissance de ses ennemis. Il passe des heures enfermé avec ces macabres « trophées », s’enfermant dans un monde de superstitions qui ne fait qu’intensifier sa folie.
Les campagnes de terreur se poursuivent. Les minorités ethniques sont pourchassées, les populations des îles sont persécutées, et les villages qui osent résister sont rayés de la carte. Des tribus entières, comme les Pagalos et les Bobis, voient leur population décimée par la faim, la maladie, et les exécutions arbitraires. Nguema pousse même sa répression jusqu’à ordonner que les enfants âgés de sept à quatorze ans reçoivent un entraînement militaire, les forçant à manier des fusils en bois, sous la menace constante d’être punis en cas de désobéissance.
Dans les derniers jours de son régime, Nguema ne fait plus confiance à personne, pas même à ses gardes. Il se retranche dans sa résidence de Mongomo, entouré de quelques fidèles, où il pratique des rites de magie noire dans une tentative désespérée de maintenir son emprise sur le pays. C’est dans ce climat de terreur et de décadence que son neveu, Teodoro Obiang, prépare un coup d’État.
Le 3 août 1979, après plusieurs jours de traque, Francisco Macías Nguema est capturé dans la jungle où il tentait de se cacher. Emmené en détention, il est jugé pour génocide, détournement de fonds publics et pour les atrocités commises contre son propre peuple. Le verdict est sans appel : il est condamné à mort. Mais aucun soldat équato-guinéen ne souhaite l’exécuter, craignant qu’il ne lance une malédiction posthume. Finalement, des mercenaires marocains sont appelés pour en finir avec l’homme qui avait fait régner la terreur sur la Guinée équatoriale.
Le 29 septembre 1979, Francisco Macías Nguema est exécuté, et c’est la fin d’un règne de terreur qui aura duré onze années.
Sommaire
Références
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