Jean-Jacques Alain, un Martiniquais maire de la ville de Saint-Louis au Sénégal (1829-1848)

Jean-Jacques Alain, ou Alin, est né en 1777 au Lamentin en Martinique. Après la Révolution Française, il migra vers le Sénégal, où il deviendra une figure majeure de Saint-Louis, occupant le poste de maire de la ville de 1829 à 1848.

Capture de Fort Louis par les Anglais, lors de l’invasion de la Martinique, le 20 mars 1794. Le navire au premier plan est le HMS Zebra, ouvrant le feu et on peut distinguer à l’arrière plan le vaisseau de 64 canons HMS Asia.

Sergent dans la garde nationale en 1792, Jean-Jacques Alain fut prisonnier de guerre en 1794 lors de la prise de la Martinique par les Anglais. Rentré en France la même année, il intégra le 2e bataillon de la Seine-Inférieure en juillet 1794. Il servit comme soldat puis caporal et sous-lieutenant dans le Bataillon des Antilles de 1794 à 1796. Durant cette période, il fut fait prisonnier à Sainte-Lucie et interné en Angleterre de 1796 à 1797. Par la suite, il devint sous-lieutenant dans le Bataillon d’Afrique à Gorée de 1800 à 1802.

Au cœur des rapports de filiation entre Africains et peuples noirs du continent américain, on cherche souvent à identifier les ancêtres des seconds parmi les premiers. Ces relations sont toutefois plus complexes, avec un certain nombre d’Africains ayant des ascendants afro-descendants des Amériques. Au Sénégal, après la Révolution Française, une centaine de « libres de couleur » originaires de la Guadeloupe, de la Martinique et de Saint-Domingue s’installent dans le comptoir français de Saint-Louis. Leur mission est de consolider la loyauté des populations françaises présentes sur place à la République nouvellement créée.

Jean-Jacques Alain, un Martiniquais maire de la ville de Saint-Louis au Sénégal (1829-1848)
Dominicains libres des Antilles, vers 1770

Parmi ces nouveaux arrivants, on trouve la famille Alain, originaire de la Martinique, qui arrive à Saint-Louis en 1799. Elle s’intègre à la communauté de métis déjà existante. Leur fils aîné, Jean-Jacques, qui sert d’abord comme soldat, devient ensuite un important commerçant spécialisé dans le domaine de la gomme et un habitant influent de Saint-Louis. Son mariage avec Marie-Paul Bénis, membre de la communauté métisse ou Signare de la ville, produira des enfants et des descendants, notamment à travers les familles Crespin et Dubrux.

Jean-Jacques Alain, un Martiniquais maire de la ville de Saint-Louis au Sénégal (1829-1848)
Signare et négresses de Saint-Louis en toilette, par Gustave Boulanger, 1861.

Jean-Jacques Alain est un exemple unique de ces Noirs libres des Antilles ayant réussi à s’établir et à prospérer en Afrique de l’Ouest. En tant que maire de Saint-Louis, il joua un rôle crucial dans le développement de la ville, mettant en place des infrastructures et améliorant les conditions de vie des habitants. Son mandat est marqué par des initiatives visant à moderniser Saint-Louis et à renforcer les liens économiques avec la France.

Il est intéressant de noter que la présence des Noirs libres des Antilles à Saint-Louis n’a pas seulement consolidé les relations entre la France et ses colonies africaines, mais a également enrichi la culture locale. Jean-Jacques Alain, par son mariage et ses activités sociales, a contribué à cette intégration culturelle, créant des liens durables entre les communautés.

Jean-Jacques Alain, un Martiniquais maire de la ville de Saint-Louis au Sénégal (1829-1848)
Saint Louis Sénégal, vue générale de la rue Brière de l’Isle

Les défis auxquels Jean-Jacques Alain a dû faire face ne manquent pas. En tant que maire, il a navigué à travers les tensions politiques et sociales, s’efforçant de maintenir la stabilité et de promouvoir le développement. Malgré ces obstacles, son leadership et sa vision ont laissé une empreinte durable sur Saint-Louis.

En 1848, Jean-Jacques Alain termine son mandat de maire, un an avant sa mort. Il fut fait chevalier de la Légion d’honneur le 2 juin 1830. Ses dernières années sont marquées par une transition en douceur du pouvoir, assurant la continuité du développement de la ville. Son héritage est toujours présent aujourd’hui, à travers ses descendants et l’impact durable de ses contributions.

Jean-Jacques Alain, un Martiniquais maire de la ville de Saint-Louis au Sénégal (1829-1848)
Saint Louis Coin de marché

L’histoire de Jean-Jacques Alain est un rappel puissant de la complexité des relations historiques entre les Africains et les Afro-descendants des Amériques. Elle illustre comment les dynamiques de migration et d’intégration peuvent façonner des sociétés résilientes et diversifiées. En étudiant des figures comme Jean-Jacques Alain, nous pouvons mieux comprendre les liens profonds et souvent méconnus qui unissent les différentes communautés noires à travers le monde.

Note et référence

Les ouvrages et articles suivants ont été particulièrement utiles pour la rédaction de cet article :

  • Hillary JonesThe Métis of Senegal: Urban Life and Politics in French West Africa. Cet ouvrage explore la vie urbaine et la politique à Saint-Louis, offrant un contexte précieux sur la période où Jean-Jacques Alain était actif.
  • Michael RalphForensics of Capital. Ce livre examine les dynamiques économiques et sociales en Afrique de l’Ouest, incluant des discussions sur le commerce de la gomme et son importance économique à Saint-Louis.
  • Archives nationales d’outre-mer : Fonds relatifs à la Martinique et au Sénégal, contenant des documents sur la migration des Noirs libres des Antilles vers Saint-Louis et la carrière de Jean-Jacques Alain. Disponible en ligne : Archives nationales d’outre-mer.

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