Calinda, art martial et danse traditionnelle des Caraïbes

Apprenez comment la Calinda a résisté aux interdictions et continue de vivre à travers les compétitions modernes et les cérémonies culturelles.

Introduction

La Calinda (également connue sous le nom de Kalenda) est une danse traditionnelle originaire d’Afrique, apportée aux Caraïbes et à Haïti par les esclaves africains. Cette danse a évolué pour devenir un art martial et une forme de musique folklorique influente dans plusieurs cultures caribéennes, particulièrement à Trinidad et Tobago et en Haïti.

Origines et histoire de la Calinda

Match de pugilat entre nègres anglais et français dans l’île de la Dominique, 1779, par Agostino Brunias

La Calinda trouve ses racines dans les danses de combat africaines, notamment celles du royaume du Kongo. Ces danses servaient à la fois de préparation militaire et de rituel culturel. Avec la traite transatlantique, ces traditions ont été transportées dans les colonies françaises d’Amérique, où elles ont été adaptées aux nouvelles réalités des esclaves africains.

Introduite au 18ème siècle, la Calinda s’est répandue à travers les colonies françaises, y compris Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti), la Guadeloupe, la Martinique et la Louisiane. Cette danse était non seulement une forme de résistance culturelle mais aussi un moyen pour les esclaves de se préparer à des éventuelles révoltes.

Évolution et influence culturelle

À Trinidad et Tobago, la Calinda s’est intégrée aux festivités du Carnival, apportées par les colons français. Après l’abolition de l’esclavage en 1833, la danse a continué de prospérer, évoluant pour inclure des chants et des rituels spécifiques, devenant un élément central des célébrations du Carnival. Les compétitions de stick fighting sont devenues un aspect formalisé de la Calinda, attirant des participants et des spectateurs de tout le pays.

En Haïti, la Calinda a été interdite au 19ème siècle en raison de sa nature perçue comme indécente, mais elle a persisté comme une forme de danse rituelle, particulièrement lors des cérémonies vaudou. La version haïtienne de la Calinda implique souvent des danses avec des bâtons, où les danseurs démontrent leur agilité et leur maîtrise.

En Louisiane, la Calinda a influencé la culture cadienne, où des musiciens blancs ont continué à jouer des versions de la danse bien après son interdiction officielle. La Calinda est également mentionnée dans la littérature louisianaise, soulignant son importance culturelle.

Pratiques modernes et compétitions

Aujourd’hui, la Calinda est pratiquée lors de festivals et de compétitions annuelles à Trinidad et Tobago. Les compétitions de stick fighting sont organisées de manière formelle, avec des règles strictes et des juges pour assurer la sécurité des participants. Les combattants, appelés « boismen« , s’affrontent dans des combats intenses, démontrant leur habileté et leur courage.

Les participants portent des costumes traditionnels et exécutent des rituels avant chaque combat. Ces rituels incluent des prières et des chants pour invoquer la protection des ancêtres. Les costumes, souvent colorés et ornés de symboles culturels, ajoutent une dimension visuelle et symbolique à la performance.

Comparaison avec d’autres formes de stick fighting

Lithographie d’un combat de bâtons dans les Caraïbes. Peinte par Agostino Brunias ; estampe gravée publiée à Londres (1779). (Copie à la bibliothèque John Carter Brown de l’université Brown.) La légende commence par « Cette planche (représentant un combat à la baguette entre Anglais et Français nègres dans l’île de la Dominique) est humblement dédiée…. ».

Des formes similaires de stick fighting existent dans d’autres régions des Caraïbes. En Guadeloupe, cette pratique est connue sous les noms de « Mayolè« , « damaye » ou « l’agya« . En Haïti, elle est appelée « kalenda« . À la Barbade, on parle de « stick-licking » ou « stick science« . Bien que les techniques varient, l’essence de la danse de combat reste la même : une célébration de la résistance et de la culture africaine.

L’origine de la Calinda est également liée aux fraternités afro-ibériennes et aux traditions des calendes, enrichissant ainsi la danse avec des éléments sociaux et communautaires importants.

Figures historiques et culturelles

De nombreuses figures historiques ont contribué à la préservation de cette danse traditionnelle Calinda. Des leaders communautaires et des artistes ont joué un rôle clé pour maintenir cette tradition vivante. Leur dévouement a permis à la Calinda de traverser les siècles et de rester une partie vitale de la culture afro-caribéenne.

Des récits de combats légendaires et de performances mémorables enrichissent l’histoire de la Calinda. Par exemple, des histoires de combattants renommés et de compétitions épiques sont transmises de génération en génération, renforçant le sentiment de fierté et d’identité culturelle.

Influence culturelle et héritage

La Calinda a influencé de nombreuses formes de musique et de danse dans les Caraïbes. Le calypso, en particulier, doit beaucoup aux chants de la Calinda. Les rythmes et les mélodies des « lavways » ont été intégrés dans le calypso, enrichissant le genre musical avec des éléments de la tradition de la Calinda.

Cet art a également laissé sa marque dans la littérature et les arts. Des écrivains et des artistes ont été inspirés par les histoires et les symboles de la Calinda, créant des œuvres qui célèbrent cette tradition unique. Par exemple, dans la littérature louisianaise, la Calinda est mentionnée dans des œuvres célèbres comme « La Belle Zoraïde » de Kate Chopin.

Des événements et des festivals dédiés à la Calinda et à ses influences ont lieu régulièrement, notamment lors du Carnival à Trinidad et Tobago. Ces célébrations incluent des reconstitutions de combats historiques, des performances musicales et des danses traditionnelles, permettant aux communautés de se reconnecter avec leur héritage culturel.

Conclusion

Calinda, danse des nègres en Amérique, 1783, aquarelle de François Aimé Louis Dumoulin

La Calinda est bien plus qu’une simple danse de combat; elle est un symbole puissant de la résistance et de la résilience des communautés afro-caribéennes. Son histoire riche et complexe, marquée par l’adaptation et l’innovation, témoigne de la capacité des cultures à survivre et à prospérer malgré l’oppression. En célébrant cette danse traditionnelle, nous honorons non seulement les traditions et les ancêtres qui l’ont préservée, mais aussi les valeurs de courage, de communauté et de liberté qu’elle incarne.

Mathieu N'DIAYE
Mathieu N'DIAYE
Mathieu N’Diaye, aussi connu sous le pseudonyme de Makandal, est un écrivain et journaliste spécialisé dans l’anthropologie et l’héritage africain. Il a publié "Histoire et Culture Noire : les premières miscellanées panafricaines", une anthologie des trésors culturels africains. N’Diaye travaille à promouvoir la culture noire à travers ses contributions à Nofi et Negus Journal.

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