Écrit par le stratège juif américain Zbigniew Brzézinski, ‹‹ le grand échiquier : l’Amérique et le reste du monde ››, est un livre géopolitique mettant en lumière les manœuvres favorisant la mainmise des États-Unis sur le monde, précisément sur le bloc de ‹‹ l’Eurasie ››. Quelle place occupe le conflit actuel russo-ukrainien dans ce livre d’actualité ? Une tutelle facile sur l’Afrique ?
Le grand échiquier de Brzézinski: un impérialisme affirmé des États-Unis d’Amérique
À la lecture de cet important ouvrage, reconnaissons que Zbigniew Brzézinski s’est distancé de l’hypocrisie intellectuelle et politique des élites occidentales. Il soutient ouvertement avec clarté un impérialisme américain. À la page 88 de son ouvrage, il affirme en toute franchise que « L’Europe de l’Ouest reste dans une large mesure un protectorat américain et ses États rappellent ce qu’étaient jadis les vassaux et les tributaires des anciens empires ».
Contrer la ‹‹ Grande Eurasie ›› : l’enjeu principal des États-Unis
» Qui domine le heartland européen domine le continent eurasiatique, et, par la suite, le monde ». En affirmant cette remarque, Zbigniew Brzézinski, s’inspire plus tard des enseignements du géographe britannique Halford Mackinder. Il était en réalité dans la quête effrénée de stratégies permettant de sauvegarder l’hégémonie des États-Unis d’Amérique sur le monde.
Pour y arriver, selon lui, les USA doivent absolument maintenir dans leur mouvance l’Europe de l’Ouest qu’il désigne d’ailleurs comme étant la ‹‹ tête de pont géographique fondamentale ››. L’Europe occidentale, précisément l’Union européenne devient une ‹‹ vassale ›› du projet hégémonique des USA. Brzézinski confirme que « la défaite et la chute de l’Union soviétique ont parachevé l’ascension rapide des États-Unis comme seule et, de fait, première puissance mondiale réelle. Alors, par la suite, selon Brzézinski, elle devra s’étendre en direction de l’Est. Évidemment, elle ne devrait pas permettre la naissance de la Grande Eurasie (Russie, Chine, l’UE avec la France et l’Allemagne en tête, etc.). Cette hégémonie aura à sa disposition le puissant bras militaire des USA : l’OTAN.
« Toute puissance qui le (le plus grand continent – Eurasie – NDLR) contrôle, contrôle par là même deux des trois régions les plus développées et les plus productives. Un simple regard sur la carte suffit pour comprendre comment la mainmise sur l’Eurasie offre presque automatiquement une tutelle facile sur l’Afrique et confère une position géopolitique périphérique aux deux Amériques et à l’Océanie », conclut Zbigniew Brzézinski.
Quels rôles devra jouer l’Ukraine contre la Russie au profit des États-Unis ?
Géographiquement, historiquement et culturellement, l’Ukraine est une porte d’entrée en Russie. Selon Zbigniew Brzézinski, il faut, pour l’hégémonie des USA, encourager l’Ukraine à maintenir son ‹‹ indépendance ›› vis-à-vis de la Russie. L’objectif est d’empêcher cette dernière de reconstituer un empire néo-soviétique. Autrement dit, les États-Unis font tout pour garder l’Ukraine dans leur camp. Ceci étant, la Russie, relativement, ne deviendrait jamais un empire puissant à l’échelle mondiale au même titre que les USA. Autrement dit, pour Brzézinski, les USA doivent éviter à tout prix le rétablissement de l’hégémonie de la Russie sur ses anciennes ‹‹ arrière-cours ›› d’Asie centrale tels que le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, etc. Il faut souligner que cette zone géographique est importante d’autant plus qu’elle est densément riche en ressources minières. Zbigniew Brzézinski précise que « l’apparition d’un concurrent en Eurasie, capable de dominer ce continent et de défier l’Amérique, remettrait en cause ces objectifs (intérêts fondamentaux de l’humanité, NDLR) ».
Par ailleurs, la suprématie dont disposent aujourd’hui les USA, fait d’eux le plus grand empire qui n’ait jamais existé à l’échelle mondiale. Cette superpuissance se fait sentir dans les importants domaines : militaire, économique, technologique et culturel. Tellement puissants qu’ils peuvent se permettre de prendre des sanctions – régulièrement illégitimes – contre n’importe quel pays, aussi puissant que ce dernier puisse paraître.
Empêcher la constitution d’autres blocs géopolitiques
Le conflit russo-ukrainien est aussi une puissante guerre économique. Il révèle au grand jour le rêve américain de ne jamais voir l’Union européenne dépendante du gaz et pétrole russes. Notons que « l’UE consomme plus de 14 % de l’énergie mondiale et n’en produit que 6,5 % ; elle importe 85 % du pétrole et 67 % du gaz qu’elle consomme, et plus de la moitié dépend des approvisionnements de la Russie », détaille le site Atalayar.
Il faudrait pour les États-Unis de créer des tensions variables en Europe et en Asie afin d’empêcher la constitution du bloc économique de la Grande Eurasie comportant principalement : la Chine, la Russie, l’Allemagne, la France et l’Union européenne en général. La constitution d’un tel bloc économique menacerait la suprématie mondiale des États-Unis. D’où le maintien du globalisme économique à l’échelle du monde en faveur des USA.
Ce globalisme économique s’associe désormais au globalisme sociétal pour conduire l’humanité dans un gouffre sans précédent. Ce globalisme sociétal devient l’autre nom de l’universalisme américain. Il fait appel à la dilution forcée des identités dans les sociétés traditionnellement ancrée au profit de la dégénérée civilisation occidentale. Or, tous sont convaincus que, partout où l’Occident agresseur ait fouiné son nez, les sociétés présentes sont tombées dans l’abîme. En fait, toutes les sociétés traditionnelles sont tenues de marcher à quatre pattes devant les normes décadentes de l’Occident.
Et l’Afrique dans tout ça ?
Nous y reviendrons dans nos prochaines publications. Inscrivez-vous à la newsletter pour ne rien rater!