Après le succès de son premier roman “Black in the City”, l’écrivaine Marie-Inaya Munza revient avec « Motéma », un recueil de poèmes qui invite à l’émotion.
On lui donnerait presque la vingtaine. Avec sa jupe plissée noire, son vernis à ongle rose et une peau lisse à en jalouser, il est facile de se laisser tromper par son apparence. Pourtant, Marie-Inaya Munza a 38 ans. Entrepreneuse, cadre commerciale, coach de vie… Telles sont les casquettes qu’elle a portées avant de se lancer corps et âme dans sa véritable passion : l’écriture. Plus précisément, la poésie.
Marie-Inaya Munza est son œuvre. Un travail directement issu de ses tripes, de ses expériences et de ses convictions. Le 30 juin, la jeune femme originaire du Congo Brazzaville sortait son deuxième ouvrage, “Motéma”, un recueil de poèmes. A travers cette œuvre, elle rend fièrement hommage à sa culture congolaise, un héritage qu’elle regrette d’avoir “un peu” perdu car elle ne parle pas couramment le lingala. C’est pourtant un mot issu de cette même langue qu’elle a choisi pour titrer son livre, “Motéma” signifiant “coeur” en lingala. Une manière à elle de faire savoir à qui veut l’entendre qu’elle a “mis son cœur à nu” afin d’ériger chacun des 35 poèmes que contient son recueil.
La poésie, un amour de jeunesse
Bien qu’elle soit devenue autrice “tardivement” selon ses propres dires, Marie-Inaya Munza s’est pourtant éprise de la poésie dès son enfance. L’écrivaine tenait effectivement un journal où elle barbouillait les “problèmes” auxquels était confrontée le petite fille de douze ans qu’elle était, tout juste arrivée en France après avoir vécu au Congo. Un carnet intitulé “Maux-à-mots”, égaré lors de déménagements.
Lorsqu’on lui demande pourquoi elle est revenue à la poésie, elle répond : “Je voulais revenir à ma passion initiale. J’avais envie de revenir à la source et exprimer les choses avec plus de profondeur”. Sa définition personnelle de la poésie pourrait convertir le plus grand bibliophobe. Pour celle qui se considère comme une “grande romantique”, la poésie, synonyme d’amour, est une approche qui vous arrache un sentiment sans faire de détour. Un style d’écriture, mais aussi une sonorité capable de déclencher une émotion incomparable.
“Motéma” est un recueil de poèmes aussi éclectique que sincère. Il aborde également des thèmes sur lesquels l’on n’attend pas forcément son autrice. Dans le poème “La rivière pleure” par exemple, Marie-Inaya traite du génocide amérindien; dans “Vanessa”, elle exprime sa compassion pour les femmes victimes de violences conjugales, tandis que dans “Nos chères mamans”, la poétesse rend hommage à toutes les mères, en particulier la sienne.
C’est évident. Pour la jeune femme, nul n’est dans l’obligation d’appartenir à une culture ou à une communauté spécifique pour défendre différentes causes. “Je n’ai pas été une femme battue et je ne suis pas amérindienne. J’ai voulu de par l’écriture de ces poèmes exprimer la douleur que ça pouvait engendrer en moi et ces thèmes sont universels. Ils m’ont bouleversée en tant qu’être humain” explique-t-elle.
Marie-Inaya Munza entre Afrique et Europe
La création de son premier roman “Black in the City” sorti en 2016, est le fruit d’une frustration restée trop longtemps enfouie en elle. Alors qu’elle se promenait dans une bibliothèque à Bordeaux, où elle vivait avant de s’installer à Paris en 2002, cette même frustration la frappa de plein fouet. Et pour cause, impossible de mettre la main sur un roman à l’image d’une héroïne ancrée dans notre époque et qui “balaye les stéréotypes de la femme noire venant du ghetto ou issue de l’esclavage”.
D’après l’écrivaine, les profils de femmes afropéennes avec une double culture manquent cruellement de tribune.
« J’avais envie d’écrire l’histoire d’une femme noire qui ne dresse pas de complexe d’infériorité comme je pouvais le voir à la télé étant jeune. Je voulais dresser le portrait d’une femme qui est bien dans sa peau, qui a un poste à responsabilités et qui vit dans les beaux quartiers”.
Marie-Inaya Munza a donc transformé sa frustration en action en créant Amanda Parks, personnage principale de “Black in the City”. Une femme afropéenne, qui vit dans le 8 ème arrondissement de Paris et qui a un poste dans une entreprise de communication. Amanda, qui souhaite évoluer dans son entreprise, sera ramenée à “sa condition de femme noire” par un racisme frontal et direct, ce qui la poussera à renouer avec ses racines congolaises.
Qu’il s’agisse de “Black in the City” ou de “Motéma”, Marie-Inaya Munza se sert de sa double culture comme fil conducteur de ses écrits. Franco-congolaise constamment ballotée entre deux univers, elle s’adresse à un public qui lui ressemble, avec une approche toute aussi africaine qu’européenne.
Black in the city ou la revanche d’une femme active Afropéenne