C’est bon : tu peux regarder « Concrete Cowboy » avec Bae. Idris Elba garde sa chemise, pendant le film.
« Viens on joue aux cowboys et aux Indiens ! » propose ton pote, qui a la permission – de jouer avec toi – jusqu’à ce que sa Maman hurle son nom dans tout le quartier : « Junior, rentre ! Ça suffit hein : c’est l’heure ! »
L’heure que tu n’as pas vue passer, tu l’as donc passée à jouer aux cowboys et aux Indiens avec : les Blancs d’un côté et les Peaux-Rouges de l’autre.
Cette représentation quasi immuable, favorisée par des années de whitewashing, ces Blancs qui interprètent le plus souvent des rôles de Noirs, tu les as gardés à l’esprit des années durant jusqu’à ce que tu vois Idriss Elba, et ces autres cavaliers noirs, monter en selle dans « Concrete Cowboy ». Ou l’histoire d’un père et d’un fils que tout éloigne jusqu’à ce que l’amour des chevaux les rapproche. En selle !
« CONCRETE COWBOY » OU L’HISTOIRE D’UN GAOU DANS LA VILLE
Poussé à l’exil par sa mère qui n’en peut plus de ses bêtises et ses bagarres à répétition, Cole se retrouve dans la ville de Philadelphie, située au Nord-Est des États-Unis, et dans les bras fantômes de son père Harp. Sauf que celui-ci n’a d’amour que pour ses chevaux et apprécie très peu, d’avoir un adolescent perturbé dans ses pattes.
Tiraillé entre l’envie de faire les 400 coups, avec son délinquant de pote, Smush, et celle de se rapprocher malgré tout de son daron, Caleb se démène comme un beau diable. Le gamin à problèmes finit par trouver la paix en montant en selle à son tour.
TEL PÈRE, TEL FILS
Barbe poivre et sel pour séduire Bae et épaules larges, Idris Elba joue ce père absent et amoureux des chevaux. Le « chéri de ta chérie » reste encore une fois fidèle à son image de beau gosse. Et tout ça sans efforts alors que toi, tu te tues à la salle de sport : matin/midi/soir. Oui, la vie est injuste : à qui le dis-tu ? Harp, lui, le sait déjà.
Ses amis et lui se battent pour conserver leur style de vie à part, avec notamment leurs écuries en plein milieu de ces quartiers pauvres. Ils n’ont pas attendu qu’un gamin de quinze ans viennent le leur dire. Cet adolescent : c’est Cole/Caleb McLaughlin.
Depuis les premiers épisodes de Stranger Things en 2016, et ces gamins qui se battent contre d’étranges monstres visqueux, Caleb McLaughlin a bien grandi.
C’est lui qui interprète donc le rôle de ce gamin à problèmes, vrai faux cousin éloigné de Tariq St. Patrick. Un autre teenager rebelle qui se prend pour un dur-à-cuire à cause de ces trois petits poils qui se battent en duel sur son visage lisse. Y a des claques qui se perdent !
SACRÉS SECONDS RÔLES !
Dommage que la cavalière expérimentée Nessie – interprétée par Lorraine Toussaint, vue notamment dans Orange Is The New Black – soit partisane de la méthode douce pour l’aider à se rapprocher de son père et lui éviter les problèmes. Mais, la bonne dame a de la concurrence avec ce pote qui lui veut soit disant du bien : Smush.
C’est Jharrell Jerome, qui t’avait fait pleurer dans When They See Us, qui joue ce jeune drug dealer poursuivi par ses démons et l’inspecteur de police Leroy – joué par un certain…Method Man.
Il a fallu réunir tout ce beau petit monde pour (re)mettre l’histoire de ces cavaliers noirs au goût du jour.
MAKE BLACK COWBOYS GREAT AGAIN!
Alexandre Dumas, Joseph Laroche, Le seul passager noir du Titanic, raconté par Serge Bilé, ou encore plus près de nous, Katherine Johnson, la brillante scientifique, dont le portrait a été tirée dans Hidden Figures, Les Figures de l’Ombre en VOSTFR, etc. De nombreux noirs et/ou afro-américains ont souvent été oubliés, voire whitewashés des livres d’histoire. Oh honte !
« Tant que les lions n’auront pas leur propre histoire, l’histoire de la chose glorifiera toujours le chasseur ! » disait Chinua Achebe.
Oui ! Tant que certains conteurs d’histoires, blancs, racontaient l’histoire, de nombreux noirs ne pouvaient récolter la gloire qu’ils méritaient. Et, c’est typiquement ce que « dénonce » Concrete Cowboy.
SHÉRIF ET COWBOYS NOIRS
L’aventure de ces cowboys noirs est une histoire oubliée comme il en existe malheureusement par milliers.
Contrairement à ce que l’industrie cinématographique américaine s’évertue à représenter dans ses westerns saupoudrés le plus souvent à la testostérone et au machisme, façon John Wayne, les Noirs sont eux aussi montés sur leurs (grands) chevaux.
Selon nos informations, les black cowboys constituaient un tiers de la population partie à la conquête de l’Ouest, approximativement fin 18ème siècle – fin 19ème siècle.
Parmi toutes ces figures noires célèbres de cette époque, il y a notamment « le premier shérif noir adjoint à l’ouest du Mississipi », surnommé « l’homme aux trois mille arrestations » : Bass Reeves.
APRÈS L’EFFORT, LE RÉCONFORT
C’est dans cette histoire jetée aux oubliettes que Concrete Cowboy tire une partie de son inspiration.
Basée sur le livre Ghetto Cowboy, le film puise aussi une large partie de sa narration dans la vie de vrais cavaliers : ceux qui vivent dans les rues de Fletcher Street, à Philadelphie. Certains d’entre eux jouent même à l’écran…
Ce combat contre la gentrification, ce goût de l’effort, en commençant par les tâches ingrates pour ensuite gagner le droit de monter ses chevaux, cette volonté de transmettre leur héritage etc. Tout ceci tend à brouiller la frontière entre fiction et réel. Et, en fait un film à regarder.
Demain, si par le plus grand des hasards, ton pote te propose : « Viens on joue aux cowboys et aux indiens ! » Places-en une pour ces cowboys et cowgirls noirs que tu auras vu dans Concrete Cowboy, le film avec Idris Elba là.