Le Nigérian John Amanam produit des sculptures hyperréalistes de parties du corps. Son objectif est de mettre des prothèses à la disposition des personnes amputées à la peau noire.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.media
La peau blanche, la peau humaine par défaut?
Dans bien des aspects de nos sociétés modernes, occidentales ou non, la couleur de peau blanche est de fait la couleur de peau par défaut. C’était le cas, jusqu’à il y a encore peu de temps, dans des domaines comme ceux des poupées, de la lingerie ou encore des émoticones. L’une des raisons principales à cela est évidemment la suivante. Les créateurs de la plupart de ces produits sont issus des pays occidentaux où les Noirs n’étaient jusqu’à récemment pas considérés comme constituant des ‘marchés’ dignes d’intérêt. Les choses ont certes depuis évolué. Il existe toutefois plusieurs secteurs où les peaux noires ne sont pas ou peu représentés par des produits les correspondant.
L’absence de prothèses noires
Un de ces secteurs est celui des prothèses pour personnes à peau sombre. En 2003 Ingrid Nicholls, une mère de famille noire britannique risquait l’amputation. Elle ne s’était alors vue proposer qu’une prothèse de pied à peau blanche par le système de santé public local. Pour obtenir une prothèse de sa couleur, elle aurait du se tourner vers le privé, débourser 3000 livres pour en obtenir une sur mesure. De même, en 2010, Ben McBean, un membre de la marine royale britannique s’était vu obligé de porter une prothèse de bras à peau blanche. Depuis ces histoires, quelques efforts ont été faits pour mettre plus facilement des prothèses à la disposition des personnes à peau sombre.
Sculpter et peindre des prothèses, ou l’art au service de la médecine
L’une de ces initiatives les plus récentes est celle de John Amanam. Ce Nigérian âgé de 32 ans début 2020 est un artiste visuel. Contrairement à nombre de ses confrères, il ne s’est pas tourné vers le marché très incertain de l’art. C’est l’amputation d’un des membres de sa famille qui lui a donné son orientation. John Amanam a décidé de sculpter et de peindre des prothèses hyperréalistes.
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Comme il l’a fait remarquer chez nos confrères d’alJazeera, les prothèses présentes au Nigeria ont généralement la peau blanche ou sont faits de matériaux peu réalistes comme le bois. Dans les deux cas, le handicap des personnes les utilisant est largement apparent. Celles-ci subissent alors souvent la discrimination ou la pitié. Les prothèses de John Amanam permettent à ceux qui les portent de se sentir moins marginalisés par la société. L’artiste, qui a créé sa marque, Immortal Cosmetic Art, a lancé un appel à tous les Noirs du monde à propos de l’importance de ses produits.
On ne peut que l’encourager à faire ainsi. Ailleurs qu’en Afrique, des Noirs souffrent de manière disproportionnée d’amputations. C’est notamment le cas aux Etats-Unis. Selon une étude de 2015, les Noirs Américains sont jusqu’à quatre fois susceptibles d’êtres amputés que leurs compatriotes blancs.
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