Souvent dépeint comme un traître au Congo de Lumumba, Moïse Tshombe est vu par d’autres comme un père de la nation congolaise, uniquement concevable selon lui comme un état fédéral.
Origines de Moïse Tshombe
Moïse Tshombe (1919-1969) était un homme politique et homme d’affaires de l’actuelle République Démocratique du Congo. Il naît à Musumba dans ce qui est alors le Congo Belge. Issu de la noblesse lunda, il est le fils d’un riche entrepreneur dont il hérite de plusieurs commerces. Après l’échec de ceux-ci, il se lance dans la politique.
Président du Katanga
Peu après les élections législatives remportées par Patrice Lumumba et l’indépendance du Congo qu’il déclare, Tshombe décide de la sécession de sa région d’origine, le Katanga, où son parti avait obtenu les meilleurs résultats, en un état indépendant. Tshombe, partisan d’un état fédéral congolais, n’aurait pas apprécié la gestion des ressources du Katanga par des non-Katangais par le gouvernement centralisé de Lumumba. La sécession de cette région riche en matières premières, largement soutenue par la Belgique puis par la France, contribue à plonger encore le Congo dans le chaos. Après la dissolution du gouvernement de Lumumba, celui-ci est extradé au Katanga avec l’accord de Tshombe, où il sera assassiné, probablement en présence de Tshombe lui-même.
Premier exil puis Premier Ministre
Lorsque les Nations-Unies parvinrent à mettre fin à la République du Katanga en 1963, Tshombe s’exila dans l’actuelle Zambie, puis en Espagne. Un an plus tard, il retourne au Congo où il devient le nouveau Premier Ministre du Congo unifié. En 1965, Tshombe est démis de ses fonctions de Premier Ministre par le président Kasa Vubu; la même année, Kasa Vubu est évincé par Mobutu qui met fin à cette crise politique, puis accuse Tshombe de trahison pour son rôle dans la sécession katangaise et ses décisions économiques en faveur de la Belgique lors de son mandat de Premier Ministre. En exil en Espagne, Tshombe est condamné à mort par le régime de Mobutu.
Fin en Algérie
Un avion où il se trouve est détourné vers l’Algérie où le gouvernement de Boumédienne le considère comme le meurtrier de Lumumba. Il y meurt en détention, officiellement par une crise cardiaque. Il sera inhumé en Belgique, où sa dépouille se trouve toujours en 2020, malgré les protestations de sa famille qui souhaite la rapatrier sur « la terre de ses ancêtres ».
Un héritage controversé
Sa famille figure parmi les voix les plus audibles pour la réhabilitation de Tshombe, considéré à l’échelle internationale comme un des responsables de la mort de Lumumba, collaborateur de l’Occident néo-colonial plus soucieux de ses intérêts personnels et tribaux que du bien-être de son pays. Dans certains dialectes shona du Zimbabwe, le mot tshombe et le verbe dérivé kutshomba en sont venus à signifier ‘traître’ et ‘trahir’ depuis les années 1960 à cause de la réputation de Tshombe. Selon des descendants de Tshombe, le projet sécessionniste katangais était une étape pour la création d’un état fédéral congolais et Tshombe devrait être considéré comme un père de la nation congolaise, aux côtés de Lumumba et de Kasa-Vubu.