Par Machia Millo. De Paris à Luanda, en passant par Bamako ; tous les gouvernements, intellectuels, acteurs de la société civile internationaux se sont accordés pour protester et lutter contre le fléau économique le plus antique et gangréneux de tous les temps : la corruption. La plateforme contre la corruption et chômage au Mali représentée par le professeur des universités Monsieur Clément Dembélé, un enseignant proche du patronat et de la population alerte la communauté internationale sur la situation actuelle au Mali.
« Il ne reste qu’un pas avant de sombrer dans le trou, ainsi ils seraient bons que tous nous nous réveillions et agissions contre la corruption. »
1) Quel est la conjoncture sociale, économique et politique actuellement au Mali ?
Le Mali vit actuellement dans une insécurité généralisée, en 2011 des attaques ont sévis où des militaires maliens ont péris, la revendication des rebelles du nord étaient de créer une république qu’ils souhaitent appelés « Azawad » car ils accusaient le gouvernement central basé à Bamako de corruption, les rebelles réfutent que le budget et les aides destinés au nord du Mali ne parvenaient pas aux citoyens. Le manque d’eau pour les populations du désert, d’infrastructures en somme de toutes les bases sociales ont abouti au coup d’état militaire qui va déchoir militairement en 2012 le général Amadou Toumani Touré, pourtant élu démocratiquement. Le pays a connu différentes crises en 1963, 1979,1989-90.
Les injustices dues à la corruption dans le centre du pays ont conduit des groupuscules islamistes à rallier à leur cause des populations démunies qui ne croient plus en l’efficacité de l’état, ces populations se sont donc recroquevillés et dépendent donc de ces groupuscules. Pour balancer des milices financés par le gouvernement malien ont été crée pour combattre cette faction. L’état malien a privatisé la sécurité quelque part, car les militaires ne pouvaient faire face à ce chaos s’agissant d’une guerre asymétrique, ces milices ont eu le récépissé pour contrebalancer. Cette disparité a crée le conflit ethnique entre les dogons (agriculteurs) généralement chasseurs et les peulhs (éleveurs traditionnels) 600 personnes périront.
2) Qui sont les victimes de corruption ?
Tout le monde est victime de corruption, riche ou pauvre, en effet les gains tirés de ce procédé illégal sont des biens mal acquis qui ne bénéficieront jamais à la génération future. La population lambda malienne est cependant la plus touchée face à ce fléau 80 % des maliens ne sont pas scolarisés, les déchets des grandes villes ne sont pas encore collectés malgré l’aide annuelle de 2200 milliards CFA.
3) Qu’est-ce qui empêche le gouvernement de résoudre ces différents problèmes?
Le premier handicap pour résoudre ce problème est l’impunité laissée au plus puissant pour écraser le plus faible, tous les délits sont donc commis à la plus grande échelle, le respect des lois est bien entendu bafoué ! Malheureusement les citoyens copient le comportement délictueux de certaines personnes hautes placées. Le second désavantage c’est le manque de budget dédié à l’éducation des populations, chacun est libre de construire sa propre école et véhiculer l’enseignement qu’il souhaite, les parents ont délégués leur pouvoir d’éducation à l’enseignant au détriment de l’instruction. La propagande était de scolariser les enfants pensant en faire de futurs fonctionnaires car le but pour tous était de pratiquer à son tour la corruption. Le paraître a pris plus de place que l’être.
4) Comment lutter efficacement contre la corruption?
Pour le cas malien, il faut s’appuyer sur la volonté sociale et judiciaire, et sur 4 volets :
– En premier temps informer les populations sur ces droits et recours pour combattre l’ignorance qui est fi du dérapage, de la mauvaise gouvernance et donne la place à tous les excès. Ensuite de l’information vient la formation, enseigner les bases fondamentales et citoyennes à toutes les couches sociales pour consolider le savoir vivre ensemble. Le troisième volet est la sensibilisation, pour donner un sens à l’action citoyenne, judiciaire et politique, ce qui engendrera la quatrième étape qui est la mobilisation.
Nous ne naissons pas citoyens, nous le devenons à travers nos implications.
Pour sensibiliser les personnes hauts placés corrompus il est important d’agir pour l’application de la loi, la pression sociale soulevée par le peuple constitue un poids massif dans la balance pour contrecarrer les corrompus qui se complaisent dans l’inaction. Le peuple est responsable de son destin et doit s’atteler au respect de la démocratie. Les intellectuels et les hommes d’action doivent sortir de cette forme de dénonciation molle pour mener l’action concrète pour que la classe dirigeante puisse changer son comportement.
5) La démocratie et la liberté d’expression vont de pair, sont-elles respectées au Mali?
La population est libre de critiquer le gouvernement, manifester, porter plainte etc. . Malheureusement, les décisions et les actualités concernant le pays sont dans la langue de Molière lorsque nous savons que 90% des maliens ne comprennent pas l’idiome. Il est important qu’un audit politique soit mise en place afin de vérifier si les différents acteurs de notre vie politique accomplissent les tâches qui leur incombent. Malheureusement, la politique, la magistrature et les administrations sont les organismes les plus corrompus.
Nous sommes dans un système complètement gangrené par la corruption qui n’est plus un phénomène institutionnalisé mais culturalisé, désormais on se vante de pratiquer la corruption! Le modèle de succès que véhiculent les personnes corrompues sont enviés par beaucoup ce qui popularise ce comportement.
Effectivement, en matière de corruption l’Afrique est un très mauvais élève,
Il y a 250 milliards CFA qui sont détournés au Mali chaque année lorsque nous nous basons sur le FMI et l’OTI (l’office contre l’enrichissement illicite au Mali) les rapports économiques sont tous d’accords sur la somme détournée annuellement, pas de manque à gagner mais détournée, ces les protagonistes de ces dérives ne sont bien évidemment pas inquiétés!
6) Comment s’organise la corruption dans les classes élevées et moyennes?
Le premier exemple que je citerai est celui d’un président de coopérative qui s’est permis récemment de dérober l’argent des 4 500 000 paysans donc adhérents et se partager l’argent avec son directeur administratif et trésorier et son coordinateur. En effet la CMDT qui est une compagnie malienne de textile verse une subvention à cette coopérative chaque année entre 1 et 2 milliards CFA par an pour que l’information, la sensibilisation et l’aide sociale soient fournies à ces paysans depuis une dizaine d’années les différents présidents manquent de formation, cela correspond à 20 milliards de CFA détournés par 4 personnes ! Ce comportement a été dénoncé au plus haut niveau, cependant aucune mesure n’a été entreprise à leur encontre. Le gouvernement n’est pas en reste en finançant des équipements de guerre inefficace et participe ainsi à cette corruption.
Le troisième cas que j’ai recensé est le rapport de vérificateur général de l’année 2018, il y a les noms des services et des entreprises d’état où des milliards ont été détournés, il a été prouvé clairement que ces sommes d’argent ont été détournées dans ces services, les médias ont bien entendu relayés cette information cependant le gouvernement reste coi face à cela.
Au niveau universitaire, les chiffres annoncent 12 000 diplômés au Mali chaque années qui cependant les statistiques ne donnent que 3% d’improbabilité, c’est à dire que 97% de jeunes maliens n’accèdent pas à l’emploi, c’est un record mondial ! Les 250 milliards CFA détournés au Mali pourraient servir à créer 70 000 emplois et permettre des rémunérations au smic malien (45 000 CFA). Lutter contre la corruption, c’est créer des emplois ! Cette somme servirait également à construire près de 1250 écoles, 900 000 enfants pourraient être scolarisés chaque année gratuitement. Chaque village pourrait s’équiper d’une école, d’un enseignant et des équipements pour étudier dans les meilleures conditions. Cette somme serait utile également pour construire 1285 centres de santé et accueillir 17 850 000 patients à raison de 10 000 patients par centre de santé gratuitement. En utilisant cette somme à bonne escient nous pouvons connectés 7000 villages et créer des pistes agricoles pour que les paysans puissent cultiver dans les meilleurs conditions. Le cancer qu’est la corruption détruit ce pays, tout développement est impossible à cause de ce procédé. Certains jeunes maliens finissent vendus en Libye, d’autres meurent dans le Sahara pensant trouver une vie meilleure en Europe, certains engouffrés dans le ventre de l’Atlantique, parqués à Lampedusa comme du bétail ou chassés comme des rats en Occident ! Cette jeunesse entretient également les plantations au Maroc. Les migrants ne partent pas par plaisir, ils cherchent les opportunités qu’ils ne trouvent pas dans leurs propre pays, le Mali n’est pourtant pas un pays pauvre !
Pour conclure 1283 milliards CFA ont été exploités pour les plantations minières, le Mali est devenu le second pays exploitateur d’or après l’Afrique du Sud, pourtant le programme alimentaire mondiale spécifie en 2018 qu’une famille malienne sur 3 ne mange pas 3 fois par jour et 2/3 d’ici 2020. Il y a en moyenne 4 coupures d’électricité par jour au Mali, le pays n’a pas couvert encore 10% de ces infrastructures routières. L’exode rural atteint 87% des 18/35 ans. Le paysan malien est endetté et vit dans la famine. L’office du Niger qui est la branche agricole du fleuve Niger possède 1 millions d’hectare, 100 000 hectares d’exploitation n’ont pas encore été atteints à cause de la corruption. Le Mali possède 12 millions d’hectare exploitable dans les domaines agro agriculture mais n’a pas encore atteint 5% de son exploitation. L’inaction est dû au fait que les dirigeants ne se soucient que de se remplir les poches durant leurs mandats et se retirer à l’étranger à la fin de celui-ci, cela explique leur manque d’empathie ou de considération lorsqu’on leur énonce le problème. Nous avons porté plainte donc dénoncer ces dérives, le magistrat les classe systématiquement. Cette attitude crée bien entendu de la frustration chez le peuple, car cela encourage la pratique de la corruption et conforte la complicité de ces institutions dans ce crime économique. Le peuple est bien entendu contre la corruption, cependant face à des personnes à des postes stratégiques corrompus , les personnes sont obligés d’accepter ce racket pour être tranquille, car si l’argent n’est pas donné votre situation est bloquée !