En 1752, des Africains à bord d’un navire négrier en route pour les Amériques, le Marlborough de Bristol, se sont révoltés avec succès contre leurs oppresseurs avant de regagner les côtes africaines.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.media
La faute ‘du peuple africain’
Ce n’est malheureusement pas rare. Nombre d’Afro-descendants des Amériques rejettent la faute de l’esclavage de leurs ancêtres sur « le peuple africain ». On présente souvent ce dernier comme un ‘mauvais père de famille. Il n’aurait pas su protéger ses enfants du crime de la traite des Noirs.
Cette idée reçue est largement facilitée par les faits suivants. Les civilisations pré-coloniales contemporaines de l’esclavage des Noirs aux Amériques les plus prestigieuses se sont souvent maintenues grâce à leur participation à l’esclavage. Les autres, détruites par leur résistance à la traite, ont laissé peu de traces matérielles. Les Afro-descendants du monde souffrent en outre d’un autre problème, celui de la négation de leur histoire et de leurs civilisations. Pour battre en brèche cette dernière, il leur est nécessaire de mettre en avant des civilisations la contredisant. Or, comme on l’a dit, nombre de ces civilisations pré-coloniales ont participé à l’esclavage.
Du côté de beaucoup Afro-descendants des Amériques, comment s’identifier à l’Afrique si ses civilisations les plus visibles ont contribué à réduire leurs ancêtres en esclavage?
Une solution peut être la référence à des civilisations africaines précédant la traite des Noirs. Une autre peut être de se focaliser sur des récits documentés d’Africains du continent ayant résisté à la traite.
La révolte du Marlborough
Un exemple de cette dernière configuration est celle de la révolte du Marlborough de Bristol. En 1752, ce navire négrier britannique était sur le chemin des Amériques. S’y trouvaient 400 Africains déportés à partir des ports de Bonny (actuel Nigeria) et d’Elmina (actuel Ghana). Ils se sont révoltés contre leurs oppresseurs, n’en laissant que deux vivants pour les conduire jusqu’à Bonny.
Cette histoire aurait pu se terminer avec une parfaite morale pour notre idéologie panafricaniste. Malheureusement, les passagers déportés à Elmina refusèrent de retourner à Bonny. Les deux partis prirent part à une rixe qui fit 98 morts. Les passagers déportés à Elmina prirent le contrôle du bateau et retournèrent dans l’actuel Ghana.
Il s’agit toutefois d’Africains ayant lutté contre la traite. Certes, ils ne peuvent pas être rattachés à un nom, un portrait ou à un monument. Mais il s’agit autant d’Africains que les puissants rois ayant contribué à les déporter eux et les ancêtres des esclaves noirs des Amériques. Pour eux, un pronom indéfini mérite d’être associé au mot ‘Africains’ lorsque l’on évoque la réaction de ces derniers face à la traite des Noirs .
Résistance africaine à l’esclavage : La révolte de Calabar (1767)