« LONG WAY HOME » : quand la sororité répare les cœurs

Prix du Jury à Deauville en septembre dernier, et régulièrement cité dans les tops 2018 de la presse américaine, LONG WAY HOME est un voyage qui n’en finit pas de marquer les esprits. Première réalisation de Jordana Spiro – déjà connue en tant qu’actrice – LONG WAY HOME impressionne par sa maîtrise et séduit par sa justesse. Comme habitées par leurs personnages, Dominique Fishback (Angel) et Tatum Marilyn Hall (Abby) peuvent alors révéler leur immense talent dans un subtil mélange de rage, de tendresse, et d’esprit.

« Long Way home » raconte la vie de deux sœurs Angel (18 ans) et Abby (10 ans), qui ont perdu leur mère, assassinée par leur père. Dévastées par cette absence et une vie qui ne les épargnent pas, elles devront se (re)construire malgré tout. La force et la volonté dont elles auront besoin, elles les trouveront l’une chez l’autre à travers un voyage où l’amour, le partage et le pardon s’imposeront comme leçons de vie.

Un film sobre qui remue les tripes

Le sujet traité dans « Long Way home » n’est pas inédit en ce sens où de nombreux films traitant des tribulations de jeunes noirs-américains ont déjà été réalisés. Pourtant, celui-ci se distingue en plusieurs points. Tout d’abord, la sobriété, qui prend forme tout autant dans la simplicité des personnages auxquels on s’identifie aisément, qu’aux plaisirs simples de leur vie qui ajoutent au réalisme de l’histoire. Il y a également de longs silences quasi méditatifs du personnage principal, ils résonnent comme des questionnements permanents et donnent son ton mélodramatique au scénario. Mais « Long Way home » est surtout un film intimiste à échelle humaine, qui accompagne Angel dans le deuil de sa mère. Il entraîne le spectateur dans un torrent d’émotions allant de la tristesse à l’espoir, en passant par la colère, à travers les yeux d’une jeune femme à l’innocence perdue.

« Elle disait que la nuit, les voitures faisaient le même bruit que l’océan, comme le flux et le reflux des vagues. Si on ferme très fort les yeux, on peut presque voir le soleil, sentir le sel et le sable. Peu importe où on est, disait-elle, il suffit d’écouter ce bruit pour être sur une plage en train de profiter du soleil. J’essaie encore et encore…Mais maman, chaque fois que je ferme les yeux, tout ce que je vois, c’est toi. »

Dès les premières scènes du film, on voit Angel LaMere dans sa cellule de détention pour mineurs, se souvenant des mots de sa mère. On imagine que son nom porte en lui le souvenir de celle qui a été le pilier de sa toute jeune vie. « LaMere » aussi comme la place qu’elle devra prendre à sa défunte mère pour sa petite sœur. « LaMere » enfin, comme référence à l’océan, qui peut par son flux peut nettoyer les traces d’un passé trop douloureux ou au contraire, entretenir en permanence des vagues remplies d’émotions. A l’aube de sa majorité, Angel sort d’une prison physique mais c’est à sa prison intérieure qu’elle devra faire face, accompagnée par sa cadette Abby, qui jouera admirablement le rôle de révélateur.

« Voyager c’est aller de soi à soi en passant par les autres[1] »

Synopsis officiel:
A sa sortie de prison, Angel, 18 ans, retrouve sa jeune sœur Abby dans sa famille d’accueil à Philadelphie. Malgré leur profonde complicité, le drame qui les a séparées a laissé des traces. Avant de tourner la page, Angel sait qu’elle doit se confronter au passé et convainc Abby de l’accompagner dans son périple. Ensemble, elles prennent la route, sans mesurer ce que va provoquer chez elles ce retour aux sources.

Angel est une jeune femme afro-américaine dont l’épaisse carapace cache difficilement la souffrance d’une orpheline perdue et en proie à la colère. Durant son année de détention, elle élabore un plan pour venger l’assassinat de sa mère. A sa sortie de prison sa priorité est donc de se procurer une arme pour exécuter l’obsession qui la hante au plus profond de son cœur. Mais comment lui en vouloir ? Sa modeste vie, après avoir été dévastée par la disparition de sa mère, fut aussi marquée par une succession de placements en familles d’accueil où elle fut victime d’abus sexuels. Pourtant, ce qui lui semblait être la seule issue à sa peine sera mis à mal par la complicité inattendue qu’elle construira avec sa jeune sœur Abby.

Elles entament alors toutes deux un voyage avec des objectifs bien distincts.
Abby, du haut de ses dix ans ne manque pas de vie et d’esprit. Elle mettra sa sœur face à ses contradictions par son besoin d’amour, de repères et de vie. Lors de ce voyage qui pourrait s’apparenter à une quête, Angel prendra conscience de l’étendue de sa colère qu’elle croyait jusqu’alors légitime, comprendra la responsabilité qu’elle a dans l’avenir de sa sœur et découvrira que seuls le pardon et l’amour peuvent libérer son cœur.

Une ode à la sororité

L’œuvre de Jordana Spiro est le symbole d’une Amérique oubliée. Les rôles d’Angel et Abby fait de « Long Way Home » une célébration de la féminité et le lien qui unit, une ode à la sororité. Leurs forces, elles les puisent dans l’amour inconditionnel, leur caractère et la solidarité dans l’épreuve. Ces deux jeunes sœurs ont réussi à sortir ensemble du cycle de fatalité qui les menait au chaos. Par ailleurs, leur interdépendance dans leur reconstruction est aussi une leçon d’humilité car en effet, des plus jeunes, les aînées peuvent apprendre, et même, dans le cas d’Angel, se sauver d’eux-mêmes.

Les performances de Dominique Fishback (Angel) et Tatum Marilyn Hall (Abby) nous donnent de l’espoir en l’avenir des jeunes. A travers les yeux d’une enfant de dix ans accablée par un système de placement familial et une vie de famille défaillante, la vie surgit et ne laisse pas de place à l’infortune car sa persévérance est un tel cri de vie qui résonne à l’écran.

« Long Way home » sort en salles le 13 février 2019!

 

[1] Proverbe Touareg

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