Le procureur général rwandais a annoncé mercredi qu’il ferait appel après que l’opposante Diane Rwigara a été acquittée à l’issue d’un procès très médiatisé.
Le Rwanda va faire appel de l’acquittement de Diane Rwigara
Le 6 décembre 2018, la Haute Cour déclarait Mme Rwigara non coupable de contrefaçon et d’incitation à l’insurrection, accusations de l’avoir emprisonnée pendant plus d’un an et mettant en exergue la répression exercée sur l’opposition dans ce pays d’Afrique de l’Est. [1]
Le procureur général Jean Bosco Mutangana a déclaré mercredi 12 décembre 208 qu’il formerait un appel, arguant que les preuves à charge avaient été ignorées.
« L’accusation n’est pas satisfaite du jugement et nous avons décidé d’interjeter appel dans les prochains jours », a déclaré Jean Bosco Mutangana lors d’une conférence de presse. « Nous avons eu le temps de lire attentivement le verdict de la Haute Cour dans le dossier Rwigara, et nous avons décidé d’aller de l’avant et de faire appel. Nous pensons que les preuves que nous avons présentées devant la Haute Cour n’ont pas été complètement prises en compte« [2]
En vertu de la loi rwandaise, le Parquet a 30 jours à compter de la date de la décision pour interjeter appel. Rappelons que les procureurs avaient demandé une peine de prison de 22 ans à l’encontre de Mme Rwigara et de sa mère.
Qui est Diane Rwigara?
Diane Rwigara, 37 ans, est la fille d’Assinapol Rwigara, un industriel qui, dans les années 90, était un donateur important du parti au pouvoir, le Front patriotique rwandais (FPR), avant de se brouiller avec ses dirigeants. Elle est devenue une des rares voix critiques à l’encontre du président du Rwanda (et encore en vie ou en liberté). Sa candidature au scrutin avait été refusée au motif qu’elle aurait contrefait les parrainages de ses partisans. Elle avait été arrêtée en septembre dernier et inculpée de falsification et d’incitation à l’insurrection pour avoir critiqué le gouvernement et le président Paul Kagame à l’approche du scrutin présidentiel.
Mais un panel de trois juges de la Haute Cour a jugé que les poursuites n’était pas justifiées. En effet rien n’inculpait formellement Mme Rwigara comme étant la falsificatrice. Il a également été déterminé que ses critiques du gouvernement lors de conférences de presse n’étaient que l’exercice de sa liberté d’expression, garantie à la fois par la constitution et par le droit international.
Les accusations ont également été abandonnées contre la mère de Diane Rwigara, Adeline, et quatre autres personnes. Mme Rwigara avait échangé avec eux des messages Whatsapp dans lesquels elle accusait le gouvernement d’avoir assassiné son mari, Assinapol Rwigara, décédé dans un accident de voiture en 2015. Sa famille considérait depuis longtemps sa mort comme un assassinat. Après son arrestation, ses frères et sa sœur furent interrogés, des biens de la famille furent vendus de force pour payer une réclamation fiscale de plusieurs millions de dollars, tandis qu’un hôtel dont ils étaient propriétaires fut démoli pour avoir soi-disant enfreint les directives de la ville. Décidément, il ne fait pas bon s’opposer à Kagame…
Notes et références
[1] « Rwanda : le parquet va faire appel de l’acquittement de Diane Rwigara« , jeuneafrique.com , publié le 12 décembre 2018
[2] « Rwanda: Prosecution to Appeal Rwigara Ruling« , allafrica.com, publié le 12 décembre 2018