Le Sénégal a inauguré jeudi 6 décembre à Dakar, son Musée des Civilisations Noires.
Un Musée regroupant la plus grande collection d’art africain
Les travaux du gigantesque projet de musée ont commencé il y a sept ans, sous la présidence d’Abdoulaye Wade (2000-2012). L’inauguration a enfin eu lieu ce jeudi 6 décembre 2018 par son successeur Macky Sall. D’une surface de 14 000 m2, le Musée des Civilisations noires pourra accueillir 18 000 pièces d’art, allant de vestiges des premiers hominidés, aux créations artistiques actuelles, selon son directeur, Hamady Bocoum. Le musée est le premier à rassembler la plus grande collection d’art africain en un seul lieu. Il prévoit de mettre en exergue « la contribution de l’Afrique au patrimoine culturel et scientifique. La métallurgie du fer a été découverte en Afrique 2 500 ans avant Jésus-Christ », a rappelé M. Bocoum, en regrettant que « d’initiateurs, nous sommes devenus un désert » industriel.
Un projet panafricain
L’idée d’un Musée des Civilisations noires avait été lancée par le poète Léopold Sédar Senghor, premier président du pays, lors du premier Festival mondial des arts nègres en 1966 à Dakar. Un demi-siècle plus tard, le MCN voit le jour. M. Bocoum confirme que « c’est un projet panafricain ». « Il y aura une facette de chaque partie de l’Afrique », a-t-il souligné. L’ouverture du MCN est une « contribution importante au tissu des musées en Afrique de l’Ouest », a ajouté le Béninois Alain Godonou, responsable du patrimoine de son pays. De plus, Hamady Bocoum, a déclaré que le musée ne serait pas «uniquement pour les civilisations noires, mais également pour les civilisations métisses». Ce positionnement tend à rassembler la culture noire à travers différents pays du monde.
Après le travail initié après les indépendances par l’écriture de 8 volumes de l’Histoire Générale de l’Afrique; le FESMAN, premier rendez-vous artistique panafricain en 1966; Dakar ouvre le Musée des Civilisations noires qui vient compléter un projet de réappropriation culturelle. Cette inauguration intervient alors qu’un rapport remis le 23 novembre au président français Emmanuel Macron, rédigé par deux universitaires, la Française Bénédicte Savoy et le Sénégalais Felwine Sarr, préconise de faciliter les restitutions d’œuvres aux anciennes colonies.
Le Sénégal fait taire les mauvaises langues
Ce projet « vient aussi vider de leur contenu un certain nombre de petits débats sur l’Afrique », a estimé M. Aledji. En effet, des doutes ont été exprimés par certains experts sur les conditions d’accueil de ces œuvres en Afrique. « Si ces biens appartiennent aux Africains, de quoi les Occidentaux se mêlent de savoir si l’Afrique sait les garder ou non ? », s’est interrogé le recteur de l’Université Cheikh-Anta-Diop de Dakar. Quant à l’historien Ibrahima Thioub, il affirme que « la question est fausse, puisque la réponse est déjà donnée par les Africains qui les ont produits et gardés pendant des siècles dans d’excellentes conditions hors des musées. »
La question de la restitution des œuvres africaines
Le ministre de la culture sénégalais, Abdou Latif Coulibaly, a affirmé mardi 27 novembre que le Sénégal souhaitait la restitution par la France de « toutes les œuvres identifiées comme étant celles du Sénégal », quelques jours après la publication d’un rapport sur le patrimoine africain commandé par le président français, Emmanuel Macron. « Nous sommes disposés à trouver des solutions avec la France. Si nous avons 10 000 [pièces identifiées comme étant originaires du Sénégal], nous souhaitons avoir les 10 000 », a déclaré M. Coulibaly le 6 décembre dernier.
Par ailleurs, « le Bénin arrive aussi », avec l’ouverture prévue en 2020 de quatre musées modernes dans des villes historiques, a souligné Ousmane Aledji, chargé de mission auprès de la présidence de son pays.
Une coopération sino-sénégalaise
La construction et l’aménagement du MCN ont été financés par la Chine pour plus de 30 millions d’euros. La Chine affirme comprendre l’importance de ce musée pour les Africains «nous avons eu des vicissitudes similaires. C’est pourquoi nous comprenons (…) la souffrance de nos amis africains. C’est ce destin commun qui nous unit et continue de donner un élan dynamique au renforcement de nos relations d’amitié et de coopération », a indiqué le diplomate Xia Huang.
Les clés de cette infrastructure ont été remises en janvier 2016 au ministre sénégalais de la Culture par Qian Keming, vice-ministre chinois du Commerce, alors en visite au Sénégal. Construit sur une superficie totale de 13.785 m² sur 4 niveaux, le musée comprend des salles d’expositions, une salle de conférence, un auditorium de 150 places et des locaux administratifs. Cette beauté architecturale a été réalisée par le Beijing Institute of Architectural Design (BIAD).
Désormais dotée d’une structure officielle et adaptée à la conservations d’œuvres d’art, la ville de Dakar pourra porter de manière plus forte la volonté de l’ensemble du continent quant à la restitution du patrimoine africain.
Le Musée des Civilisations Noires exposera des objets d’Egypte ancienne