Thérèse Athanase: une martiniquaise avant-gardiste

Thérèse Athanase est une martiniquaise, arrivée en région parisienne dans les années soixante. Agée de 20 ans, son fort tempérament lui permettra de s’écrire une vie d’exception. Un parcours non sans embûche. Elle a su tirer le meilleur de ses aventures pour être à ses soixante-quatorze ans, une référence pour la ville de Viry- Chatillon.

Une enfance créole

Thérèse Athanase est l’ainée de 5 enfants. Elle est née en 1944 à Fort-de- France en Martinique.Lorsque Thérèse parle de ses souvenirs d’enfant, elle n’y voit que des instants de bonheur. Son père marin navigateur et sa mère couturière vont lui inculquer les valeurs d’échanges et de communication. Des parents ouverts d’esprit, pédagogues, qui vont lui apprendre à s’affirmer. Elle n’hésite donc pas à tenir tête à son père lorsqu’elle le juge nécessaire : prémices de dialogue sur les raisons de la vie.

« J’avais 7 ans quand j’ai aidé ma mère à accoucher de ma deuxième petite sœur. Née avec le cordon autour du cou, ma mère a accouché à la maison. Je m’en souviens comme si c’était hier. Plus tard, quand sa sœur la taquinait un peu trop, Thérèse lui rappelait les bons souvenirs. »

« J’étais assez rebelle dans mon style ». À l’école, Thérèse Athanase ne traîne qu’avec les garçons. Eux aussi vont lui permettre les relations sociales. Des amis masculins dont elle saura se faire respecter. Au lycée technique à Schœlcher en Martinique, elle suit des cours d’infirmier jusqu’à l’obtention de son premier job.

Rencontre avec son futur mari

N’arrivant plus à vivre de son métier de couturière, la mère de Thérèse trouve un travail au presbytère de Saint- Thérèse, à Fort- de- France pour y faire la lessive.

« On allait l’aider de temps en temps. C’était un travail très fatigant pour elle. »

En allant aider sa mère au travail, elle rencontre son futur mari: un jeune qui passait son temps au presbytère. « On a discuté, discuté !  J’ai fini par le surnommer l’enfant des prêtres ».  Pendant que ce jeune et elle apprennent à se connaître, il passe le concours de la fonction publique et part en métropole. Les amoureux vont être séparés pendant 4 ans, de 1962 à 1966.  Pendant ce temps, les correspondances vont permettre au couple de survivre.

Parallèlement, le médecin de famille de la jeune fille avait besoin d’ouvreuses (s’occupe de l’accueil des patients et fait les soins infirmiers). Il lui propose ce travail qu’elle accepte.

La demande en mariage

Depuis la métropole son amoureux lui propose de faire des fiançailles par correspondance. « Je suis allée voir le prêtre et je lui ai dit : Comme vous le considérez comme un fils, vous allez me remettre ma bague de fiançailles. »

Le jeune vivant dans l’hexagone lui propose de lui payer son billet pour rentrer et se marier. Son père refusa, exigeant qu’elle se marie en Martinique, quitte à repartir pour la France après. Thérèse accepte la proposition de son père car elle se dit : « Je n’ai pas envie d’arriver là-bas et qu’il me dise qu’on ne se marie plus ».

Arrivée en métropole

Thérèse Athanase quitte son quartier de Sainte-Thérèse à (Fort-de France) à l’âge de 22 ans après s’être mariée en 1966.  Après 22 jours de voyage en bateau à bord de l’Irpina, elle arrive en France métropolitaine par le sud. Un voyage en  train, puis c’est l’arrivée sur Paris. Son mari a loué  un studio pour son arrivée. « J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, j’avais le mal du pays ».

Le couple donnera naissance à une petite fille  dans cet appartement avant de trouver un logement dans la région parisienne, à Viry- Chatillion.

La recherche de travail

Grâce à la cousine de son mari, la Martiniquaise décroche un job de poinçonneuse de métro à la RATP. Très vite, elle gravit les échelons du réseau ferré. Huit ans tard, elle quitte les services des réseaux ferrés après être devenue cheffe de station.

À l’aube de la trentaine, Thérèse Athanase veut faire avancer sa carrière. Elle suit des cours de stylo- dactylographie chez Pigier, une école par correspondance. Elle passe son examen et obtient son diplôme puis réussit le concours de la fonction publique. Au même moment, le Ministère de l’équipement recrute. Le responsable du personnel lui offre deux possibilités pour devenir cheffe de pool : soit  être contractuelle, être bien payée sans espoir d’évoluer, ou être stagiaire avec un salaire divisé par deux et grimper au fur à mesure les échelons. Elle choisira la deuxième proposition. « J’ai terminé cadre B de la fonction publique ».

Seule et unique réflexion raciste

« Quand le poste de cheffe de pool m’a été proposé, le ministère de l’équipement était en pleine réorganisation. L’ancienne cheffe de poste lorsqu’elle apprit que l’on m’avait proposé ce poste, s’est permis de dire à mes collègues : Vous acceptez qu’une noire vous commande ???!! Je me suis dit, je ne laisse pas ça passer. Je suis allée voir le directeur. Ce dernier me dit : Faut comprendre, elle est fatiguée ! J’ai répondu : Non ! Vous faites ce que vous voulez mais je porte plainte contre ça. J’ai fait un écrit. Ils ont accepté le courrier et plus personne ne s’est permis de m’insulter de la sorte. Cela a servi d’exemple pour les autres, car il y avait d’autres minorités. »

Les premiers pas dans ce syndicat.

Très vite Thérèse Athanase comprend que pour aider les autres, il faut faire partie d’une équipe. « Quand il y a une lutte, plus on est nombreux, plus on avance et plus on a de chances d’obtenir ce que l’on souhaite. A l’exemple des 35 heures, s’il n’y a avait pas des gens qui s’étaient battus pour les obtenir, nous serions toujours à la semaine des 40 heures ». Simone Weil a également inspiré Thérèse. Elle intègre le syndicat de son travail. C’est une voix qu’on entend. Elle se bat pour ses collègues mais aussi pour les droits des handicapés. C’est à ce moment qu’elle se fait remarquer.

Les débuts en politique

« Un jour, un collègue m’avoue qu’il m’observe depuis longtemps ». Il lui propose de faire de la politique. Thérèse s’informe, trouve le bureau du parti socialiste de sa ville, et y adhère.

Une fois inscrite sur la liste des élections municipales, le succès ne tarde pas. Première élection, Thérèse est élue mais cela ne lui permet pas d’être dans la majorité. Elle se retrouve dans l’opposition. Ça ne l’empêche pas de continuer à s’investir pour la ville de Viry-Châtillon. Le mandat suivant, sa liste remporte l’élection.

Conseillère municipale à la mairie de Viry-Châtillon jusqu’en 2014, la Martiniquaise consacrera 25 ans de sa vie à la commune. De bons comme de mauvais souvenirs, qui n’ont jamais entaché son investissement. A l’image du temps qui passe, elle a laissé sa place à la nouvelle génération.

Une retraitée bien aimée

Profitant de sa liberté pour aller aux conférences, au théâtre, s’amuser, Thérèse Athanase est une référence pour les habitants de la sa ville. Ils la consultent et lui demandent conseil. Il lui arrive parfois de faire la médiatrice entre la mairie et les administrés… « Car quand on a une passion, on ne la quitte pas. »

Thérèse Athanase, une adjointe au maire de la région parisienne qui n’a pas fini d’écrire son histoire…

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