Médaillé d’argent aux Jeux Olympiques à Rio en 2016, le marathonien Feyisa Lilesa avait croisé les poignets au-dessus de la tête en franchissant la ligne d’arrivée. Ce symbole des manifestations anti-gouvernementales en Ethiopie l’avait obligé à s’exiler aux Etats-Unis pour sa survie. Après deux ans d’absence, il est enfin de retour au pays.
Feyisa Lilesa ose un geste politique fort
Durant les Jeux Olympiques de Rio en 2016, Feyisa Lilesa s’est adressé au monde. Le médaillé d’argent du marathon avait placé ses bras croisés au-dessus de sa tête, comme ligotées, au moment de franchir la ligne d’arrivée, puis sur le podium. Ce geste utilisé dans les manifestations anti-gouvernementales de l’époque en l’Ethiopie, le transforma en opposant politique.
En effet, ce courage aurait pu lui coûter la vie. Le marathonien protestait contre la répression brutale des manifestants Oromos. Ces derniers, majoritaires dans le pays, s’opposaient à un projet d’appropriation de terres. « Si je retourne en Éthiopie, peut-être qu’ils vont me tuer, ou me mettre en prison ». C’est avec ses mots que Feyisa Lilesa avait alors expliqué les conséquences de son geste.
« Depuis neuf mois, un millier de personnes ont été tuées (…) J’ai des proches en prison au pays. Si vous parlez de démocratie, ils vous tuent », avait ainsi dénonçait le coureur face aux médias du monde entier. Ainsi, après ce geste fort et symbolique, Feyisa Lilesa dû assumer les potentielles répercutions. Pour éviter une probable peine de prison ou la peine de mort, il s’installa aux Etats-Unis.
D’Exilé à héros national
Ainsi, depuis les évènements de Rio, Fayisa Lilesa vivait aux Etats-Unis, dans l’Arizona. La répression que connaissait son ethnie en plus du geste de protestation rendait impossible sa vie en Ethiopie.
Mais d’avril 2018, et pour la première fois dans l’histoire de l’Ethiopie, le Premier ministre, Abiy Ahmed, est un Oromo. Depuis son arrivée au pouvoir, il a pris de nombreuses mesures pour tenter d’apaiser les tensions ethniques, qui durent depuis plusieurs années. En effet, le Premier ministre a levé l’état d’urgence, libéré des prisonniers politiques et sortit le Front de Libération Oromo de la liste des organisations terroristes.
Aussi, depuis son accession au pouvoir, Abiy Ahmed avait déjà proposé à Fiyesa Lilesa de rentrer en Ethiopie. Dorénavant, ce sont le Comité olympique et la fédération d’athlétisme qui ont cosigné une lettre ouverte pour demander au marathonien de reprendre sa carrière dans et pour son pays. «A son retour, nous sommes prêts à l’accueillir en héros», avaient-ils annoncé.
Le retour dans son pays
A l’instar de Tommie Smith et John Carlos, qui avaient leur poing lors des JO de 1968 à Mexico, Lilesa les avaient croisés pour protester. Néanmoins, c’est un avenir meilleur qui se dessine pour le marathonien. En effet, Lilesa est rentré d’exil dimanche 21 octobre 2018. Il répondait ainsi favorablement à la lettre ouverte de la Fédération éthiopienne d’athlétisme.
Lors d’une conférence de presse organisée dans un hôtel de la capitale Addis-Adeba, le sportif s’est dit « heureux d’être de retour » dans son pays qui est désormais dirigé par un Premier ministre issu de l’ethnie oromo.
« Maintenant, les gens peuvent exprimer librement leurs opinions et condamner librement le gouvernement » a déclaré, enthousiaste, Feyisa Lilesa.
Son objectif est de continuer à courir et de s’améliorer. Notamment pour participer au marathon de Dubaï, aux Emirats arabes unis, en janvier 2019.
« Aux Etats-Unis, je n’avais pas de bonnes conditions d’entraînement. Je veux revenir à mes performances antérieures et j’ai bon espoir de réaliser de bons résultats pour mon pays et pour moi-même. »