Plusieurs célèbres Occidentaux pratiquants d’arts martiaux ont décidé de concourir dans la lutte sénégalaise ou lamb, sport traditionnellement pratiqué quasi-exclusivement par des Africains de l’Ouest.
Par Sandro CAPO CHICHI de New African Cultures / nofi.media
La lutte sénégalaise, appelée lamb en wolof et njom en sérère, est un véritable phénomène de société au Sénégal. Le lamb se distingue d’autres types de lutte en ce qu’il permet à ses pratiquants de porter des coups et de déséquilibrer son adversaire avec les jambes. Mais la plus grande particularité de ce sport est son côté mystique, son association à des rituels locaux censés favoriser la protection et la victoire des combattants.
Depuis plusieurs décennies, ce sport traditionnel sérère s’est professionnalisé pour transcender ses origines sérères et ses frontières sénégalaises pour générer des millions de Francs CFA et dépasser de très loin l’intérêt et les cachets accordés à d’autres sports comme le football. Il intègre aussi des lutteurs issus d’autres traditions similaires comme celles du Niger pour devenir une sorte de sport régional, voire à terme de ‘lutte africaine’.
Plus récemment encore, la lutte sénégalaise a su générer l’intérêt de pratiquants de sports de combat occidentaux disposant parfois d’une notoriété dans leurs disciplines d’origine.
Juan Espino, ‘le lion blanc’
Originaire des îles Canaries en Espagne, Juan ‘Le lion blanc’ Espino, a plusieurs fois été sacré champion du monde et d’Europe de grappling, un type de lutte sans frappe où les combats se terminent souvent par des clés de bras ou des étranglements entraînant la soumission ou l’immobilisation de l’adversaire. Pratiquant la lutte canarienne depuis sa tendre enfance, Juan a également expérimenté le ju-jitsu brésilien, le sambo, le Kourach (type de lutte d’Asie Centrale), le gouren (type de lutte celte) et la lutte coréenne, pour apprendre les spécificités de la lutte dans le monde. Ce qui l’a attiré dans la lutte au Sénégal, c’est l’intérêt qu’elle ne suscite nulle part ailleurs dans le monde. Au début des années 2010, Juan Espino s’est lancé dans la lutte sénégalaise, devenant le premier lutteur professionnel européen dans le pays et s’intégrant parfaitement aux traditions locales d’avant combat. Au moins jusqu’en 2013, Juan était invaincu dans la discipline. Depuis, il s’est tourné vers le MMA, remportant six victoires d’affilée en 2017 et espérant affronter les meilleurs dans la catégorie des poids lourds de cette discipline.
Fabrice Allouche
Si la lutte sénégalaise attire des spécialistes d’autres disciplines, il s’enrichit aussi grâce à ses dernières. C’est par exemple le cas avec le Français Fabrice Allouche, surnommé ‘le sorcier blanc’ (sic) champion de boxe pieds-poings des années 90, qui a été le premier Européen à intégrer en 2010, une école de lutte sénégalaise professionnelle, celle de Katy Ndiop de Ndakaru où a évolué l’un des plus grands lutteurs de l’histoire, Yékini. Il y a notamment démocratisé l’entraînement en boxe et imposé et son style préparation mentale avec laquelle il a coaché de nombreux champions comme la légende du pieds-poings Jérôme Le Banner ou le footballeur Samir Nasri. Bien qu’il ait depuis quitté le Sénégal, Allouche continue à être influent sur le sport, partageant ses analyses techniques sur le sport et ses combats à travers divers médias.
Aurélien Duarte
Autrefois pensionnaire du célèbre club Haute Tension de Jean-Marie Merchet, Aurélien Duarte est l’un des plus grands combattants de pieds-poings de la séquence allant de la moitié des années 90 au début des années 2000. Dans le cadre d’une série de reportages intitulée Planet Fight, Duarte s’est rendu au Sénégal pour s’entraîner à la lutte pendant une semaine afin de défier un combattant local.
Si Duarte, Français d’origine cap-verdienne né en 1970 et aujourd’hui ‘coach en développement humain’ ne fera pas carrière dans la lutte sénégalaise, il a grâce à son reportage vu par au moins 1800000 de vues jeté une lumière inestimable sur ce sport africain.
Bob Sapp
En 2018, l’ancien catcheur et star du pieds-poings et du MMA Bob Sapp devrait affronter l’ancien double champion de lutté sénégalaise ‘Bombardier’ récemment détrôné par Eumeu Séne.
Malgré plusieurs bonnes performances au début de sa carrière, Sapp a davantage du sa popularité sur son physique impressionnant (2 mètres pour 160 kgs) et son personnage de ‘bête féroce’ joué auprès du public japonais. Âgé de 45 ans en 2018, l’Américain apparaît aujourd’hui largement en fin de parcours avec 17 défaites sur 19 combats de MMA et 12 défaites sur 14 combats enregistrées ces dix dernières années. Son combat face à Bombardier, qui sera âgé de 42 ans à la fin 2018, pourra toutefois générer un intérêt à propos de la lutte sénégalaise à travers le monde. C’est en effet ce qu’a à gagner ce sport en absorbant de manière intelligente ce que les combattants étrangers ont à lui offrir tout en maintenant ses traditions et son essence : permettre à l’Afrique de renouer avec son rayonnement culturel des origines.
https://nofi.fr/2014/12/muhammad-ali-digne-heritier-du-dambe-boxe-traditionnelle-dafrique-de-louest/7541