Tarana Burke, la véritable mais méconnue fondatrice du mouvement #MeToo, a déclaré que le harcèlement sexuel pouvait concerner les femmes comme les hommes.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.media
Durant l’été 2015, bien avant l’émergence du mouvement #MeToo, je discutais en privé avec deux universitaires parisiens, l’un militant des droits des homosexuels et l’autre militante féministe radicale. A cette occasion, ils mentionnèrent une autre universitaire féministe parisienne. Ils décrivirent comment celle-ci avait pris la mauvaise habitude de ne diriger les projets de recherche d’étudiantes que si elles acceptaient d’avoir des relations sexuelles avec elle.
Ma surprise a été pour le moins grande lorsque je découvris, au plus haut du mouvement #MeToo, que l’universitaire incriminée passait d’un média français à l’autre en se faisant porte-parole de #MeToo, présentant ce dernier comme son combat à elle et aux autres femmes.
N’étant plus en contact avec ces deux universitaires, je ne saurai peut-être jamais s’il ou elle ne faisait là que relayer des rumeurs infondées. Toujours est-il que malgré leur connaissance des milieux féministes et homosexuels, il ne leur a pas paru impensable qu’une femme, même féministe, abuse de son pouvoir pour chercher à obtenir des relations sexuelles de personnes en position de faiblesse. C’est pourtant ce comportement qui constitue la cible du mouvement #MeToo.
La redéfinition de #MeToo comme un mouvement combattant les abus sexuels liés aux pouvoir semble prendre forme ces derniers jours avec les accusations lancées à l’encontre de l’actrice italienne Asia Argento, l’une des victimes d’Harvey Weinstein les plus médiatiques. Argento a été accusée d’abus sexuel sur mineur. La victime, Jimmy Bennett, était âgée de 17 ans au moment des faits en 2013. D’après le New York Times, l’actrice aurait offert 380000 dollars à Bennett en avril 2018 pour acheter son silence.
Le 22 août, Argento a nié avoir entretenu des rapports intimes avec Jimmy Bennett, prétendant qu’elle lui avait remis la somme en question pour le soutenir à cause de ses difficultés financières du moment.
L’explication peine toutefois à convaincre beaucoup depuis que nos confrères de tmz.com ont publié une photo des deux acteurs dénudés sur le même lit, ainsi que des SMS et lettres suggérant fortement une relation intime entre eux.
Entre temps, la fondatrice du mouvement #MeToo, Tarana Burke avait commenté sur son compte Twitter ces révélations qui, selon certains observateurs, pourraient se révéler dévastatrices sur le mouvement et la crédibilité des victimes de violences sexuelles osant dénoncer leur agresseur.
« J’ai dit à plusieurs reprises que le #MeTooMVMT concerne tout le monde, y compris ces jeunes hommes courageux qui commencent à se manifester. Entendre les noms de certaines de nos [stars préférées] associées à des violences sexuelles continuera à être clivant tant que l’on arrêtera pas de parler d’individus au lieu de parler de pouvoir. Les violences sexuelles relèvent du pouvoir et du privilège même si la personne à l’origine de ces violences est votre actrice, activiste préféré ou professeur, peu importe son sexe. Et on ne changera pas la culture tant que l’on ne changera pas cette façon de voir les choses. »
« Un changement peut avoir lieu. Ce mouvement laisse beaucoup de possibilités. Mais, cela ne pourra se produire qu’après que nous ayons complètement brisé ce tabou et qu’on ait finalement intégré le fait qu’il n’y a pas un type d’agresseur et qu’il n’y a pas de victime modèle. Nous sommes tous imparfaits en temps qu’humains et nous devons tous être tenus pour responsables de notre comportement individuel. »
https://nofi.fr/2018/07/agressions-sexuelles-et-harcelements-des-femmes-racontent-leur-finale-de-la-cdm/56352