En 2019, Lisbonne, la capitale portugaise, devrait inaugurer le premier monument rendant hommage aux victimes de l’esclavage.
Le Portugal entre gloire et mémoire
Un mémorial consacré à la mémoire des déportés africains est un des deux projets retenus par la ville de Lisbonne.
Le premier projet proposé par une association d’afrodescendants sera érigé en 2019. Il se trouvera sur la Ribeira das Naus, l’ancien quartier de construction et d’armement des navires. Le second, promu par le maire de la ville Fernando Medina, consiste à la création d’un musée des Grandes Découvertes. Celui-ci glorifiera les expéditions portugaises, celles qui ont engendré la déportation de six millions d’esclaves.
Le sujet fait polémique. Cependant, certains plaident pour une fusion des deux projets. En effet, l’un (les grandes découvertes) est indissociable de l’autre (les déportations d’esclaves). Pour Beatriz Dias, la présidente de la Djass-Associação de Afrodescendentes, une structure mémorielle est néanmoins indispensable.
« La lutte contre le racisme a besoin de structures symboliques, et la nécessité d’un monument qui aille à l’encontre de la glorification des découvertes était une évidence pour nous »
L’amorce d’un changement
En 2017, le projet « Testemunhos da Escravatura. Memória Africana » (Les Preuves de l’Esclavage. Mémoire africaine), fut initié à Lisbonne. Il s’agissait d’une exposition nommée « Passado e Presente – Lisboa, Capital Ibero-americana de Cultura 2017 » (Passé et Présent, Lisbonne capitale ibéro-américaine de la Culture 2017). Elle eut lieu au Musée d’Ethnologie le 22 avril 2017. Cet amorce engendra la volonté d’une reconnaissance plus grande. Or, le Portugal n’avait jusqu’alors pas entrepris de « devoir de mémoire ». Pourtant, le pays fut le premier à s’engager dans la traite négrière transatlantique.
Bref retour historique
Le Portugal fut le premier pays européen engagé dans la traite transatlantique. Ainsi, durant plus de cinquante ans, les navires portugais contrôlaient l’introduction des esclaves africains en Europe du sud, dans leurs colonies (Cap-Vert, São Tomé, Brésil) mais aussi en Amérique, sous le monopole espagnol. La conquête portugaise s’entendit aux Canaries, au Cap-Vert et à São Tomé. Puis dans les Caraïbes (Hispaniola, Cuba, Porto Rico) avant de prendre son essor dans les Antilles et au Brésil avec la grande économie de plantation.
En 1540, plus de 5000 esclaves par an transitaient déjà par le port de Lisbonne. Au milieu du siècle, Lisbonne fut la plus importante ville noire de tout le monde hispanique avec plus de 10 000 Noirs. Ils représentaient approximativement 10 % de la population de la ville.
https://nofi.fr/2017/08/manikongo-funsu-nzinga-mbemba/41973
Sources:
« Les réseaux de la traite ibérique dans l’Atlantique nord (1440-1640) » par António de Almeida Mendes