Le cobalt est le minerai le plus demandé au monde. Il sert pour la fabrication de batteries nouvelle génération que l’on retrouve dans les Smartphones et les voitures électriques. La République démocratique du Congo, premier exportateur du minerai, vend 80% de sa production à la Chine.
Le cobalt à tout prix
Sur le marché mondial, le cobalt coûte 82 000 dollars la tonne. Sa côté à la Bourse des métaux de Londres a été multipliée par 2.7 en deux ans. L’explosion de la demande du minerai est due à la fabrication de batteries nouvelle génération utilisées pour la fabrication des Smartphones et des voitures électriques. Le cabinet de conseil Morgan Stanley estime ainsi que les véhicules électriques devraient représenter la moitié des ventes mondiales à l’horizon 2050. En 2016, 2 millions de voitures électriques ont été vendues dans le monde, et l’an passé, les ventes ont augmenté de 13 %. D’ici à 2040, certains prédisent qu’il pourrait s’en écouler davantage que les voitures à essence. Il faut entre dix et jusqu’à plus de 20 kg de cobalt par batterie. Dans un article publié par le site scientifique The Conversation, Ben McLellan, chercheur à l’université de Kyoto au Japon, estime que l’industrie automobile « devrait se soucier du fait que l’approvisionnement d’un de ses minéraux essentiels (…) pourrait être trop centralisé dans un seul pays. » En effet, le cobalt extrait de la RDC représente 2/3 de la production mondiale.
Quelles retombées pour les Congolais?
La République démocratique du Congo vend son cobalt à l’état brut, la transformation du minerai est effectuée par les grands groupes qui le lui achètent à bas prix. Le géant canadien Glencore (basé en Suisse), l’entreprise chinoise China Molybdenum et l’indien Chemical of Africa se partagent le gâteau. Glencore, premier producteur mondial de cobalt, surfe sur ces projections. Le groupe suisse a annoncé récemment qu’il comptait doubler sa production en RDC d’ici à 2020.
« La RDC n’exporte pas de produits finis prêts à être utilisés par Apple, Samsung ou tous les grands utilisateurs de batteries du monde. Elle exporte un produit minier qui est au stade de traitement », déplore l’économiste et activiste congolais Florent Musha.
En octobre 2017, la coentreprise sino-congolaise Sicomines justifiait ce deal par le manque d’électricité disponible en RDC pour la transformation sur place du minerai…Le barrage Inga et l’immense fleuve Congo ne suffiraient-ils pas pour une utilisation hydro-électrique?
Néanmoins, le président Joseph Kabila s’apprête à réviser le code minier. Celui de 2002 est jugé trop favorable aux entreprises étrangères. Déjà adopté par l’Assemblée nationale, le nouveau texte est en discussion au Sénat et prévoirait « le relèvement des taux de la redevance minière ». Les autorités souhaitent augmenter les taxes par 5. Autre dispositif prévu par le nouveau texte : le rapatriement effectif de 40 % des recettes des ventes de minerais à l’exportation.
L’offensive chinoise
La cité minière de Kolwezi (Sud-Est) est surnommée de manière sordide le « dépôt Apple ». Malgré la flambée des cours du cobalt, un mineur congolais vend son minerai au maximum 7000 dollars la tonne aux chinois. 80% de la production part des ports de Dar es Salam ou du Cap en Afrique du Sud à destination de la Chine.
« La production de cobalt raffiné à augmenté de 20% en Chine. Avec 62 800 tonnes, elle représente 60% de l’offre mondiale », affirme le courtier Londonien Darton.
La Chine vient de signer l’un des accords les plus importants pour assurer son approvisionnement en cobalt. En plus de sa seconde place en tant qu’importateur du minerai brut, elle fait également main basse sur la partie recyclage du minerai. Le groupe chinois GEM, spécialiste des matériaux pour batteries et du recyclage coté à la Bourse de Shenzhen, s’est entendu avec le géant minier et du négoce Glencore pour lui acheter environ un tiers de sa production au cours des trois prochaines années. Il serait question au total de plus de 50.000 tonnes, soit l’équivalent de près de la moitié du cobalt extrait en 2017.
Un marché clandestin très lucratif
Sur le marché clandestin aussi, nous retrouvons l’omniprésence chinoise. Dans ce que l’on nomme « les mines artisanales », les mineurs ou « creuseurs » ramassent à mains nues le cobalt extrait à plusieurs mètres de profondeur. De nombreux drames s’y produisent, éboulements meurtriers, pillages et surtout la présence d’enfants exploités.
« Les mineurs extraient le cobalt avec des outils rudimentaires et sans protection. Les puits qu’ils creusent sont souvent plus profonds que la norme légale de 30 mètres. Ils descendent parfois à 60 ou 70 mètres et ils n’ont aucune protection. Ces personnes travaillent dans des conditions très dangereuses et lorsque les puits s’effondrent, il y a des morts », explique Lauren Amistead d’Amnesty International.
Ce marché clandestin a explosé ces dernières années, conséquemment à l’augmentation de la demande. Il représente 1/4 du cobalt vendu sur le marché de la RDC. Les mines sont contrôlées par la garde présidentielle qui surveillent (ou protège?) les entreprises chinoises. Dans un rapport publié en novembre 2017, Amnesty International a dénoncé les conditions de travail effrayantes dans les mines de cobalt en RDC, où 20% de la production serait assurée par des exploitations artisanales. Rappelons que 70% des congolais vivent en dessous du seuil de pauvreté.
https://nofi.fr/2018/02/rdc-deux-compagnies-chinoises-se-partagent-650-000-ha-de-foret/48623
Sources: