L’organe national de régulation de la presse et des médias chinois, le GAPPRFT, a interdit la diffusion à la télévision de programmes mettant en scène la culture hip-hop. A cette dernière fut notamment reprochée sa ‘vulgarité’ et son ‘obscénité’.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.media
Ces dernières années, un nombre de célébrités afro-américaines incluant Amandla Stenberg et Jesse Williams ont dénoncé un paradoxe qui frappe selon eux le rapport contradictoire de la population blanche américaine à propos des Afro-Américains. Pourquoi aiment-ils vraisemblablement beaucoup plus la culture afro-américaine que les Afro-Américains? Pourquoi utilisent-ils tant la culture afro-américaine tout en méprisant ses créateurs?
Si ce paradoxe semble se maintenir aux Etats-Unis, un pays a semble-t-il été cohérent à propos de ses nombreuses exactions contre des Noirs. Il s’agit de la Chine, qui en janvier 2018 a banni de la télévision la facette la plus célèbre de la culture afro-américaine, à savoir le hip-hop.
Cette décision a été le fait du GAPPRFT (Administration générale de la presse, de l’édition, de la radiodiffusion, du cinéma et de la télévision), l’organe national de régulation de la presse, de la télévision, du cinéma, de la radio chinois. Directement sous l’autorité du Conseil des Affaires de l’Etat chinois, le GAPPRT a aussi interdit, en même temps que la culture hip-hop, ‘les acteurs portant des tatouages’, la ‘sub-culture’ et la ‘culture décadente’.
Cette décision, rapportée par le magazine local Sina a aussi été accompagnée d’injonctions de la part du responsable de la communication du GAPPRFT:
« Ne jamais utiliser d’acteurs dont le coeur et la moralité ne sont pas alignés avec le Parti (Communiste Chinois, NDLR) et dont la moralité n’est pas noble.
Ne jamais utiliser d’acteurs sans goût, vulgaires et obscènes
Ne jamais utiliser d’acteurs dont le niveau idéologique est bas et qui n’ont pas de classe.
Ne jamais utiliser d’acteurs touchés par des scandales, possédant de mauvaises réputations et une intégrité morale posant problème. »
Si les parallèles entre le hip-hop et les mauvaises moeurs n’ont pas été tracés de manière explicite dans ces communiqués, ils peuvent s’expliquer par les mauvais comportements d’artistes hip-hop lors d’un passé récent.
Le plus notable d’entre eux fut sans conteste le rappeur PG One, qui au début du mois de janvier 2018 fut publiquement critiqué dans les médias chinois pour les lyrics d’une de ses chansons. Il s’y vantait notamment de violer une femme et de consommer de la ‘poudre blanche’.
Sous la pression médiatique, le rappeur chinois fut contraint de s’excuser pour ses propos vulgaires en déclarant sur que « l’esprit du hip-hop devrait toujours être l’amour et la paix ». De manière tout à fait surprenante, le même artiste a quelques jours plus tard eu une réaction bien différente face à la culture à laquelle il doit son succès. Il a ainsi expliqué que la vulgarité de ses lyrics devait être expliquée par sa ‘longue exposition à la culture hip-hop’ et par la ‘profonde influence de la musique noire’.
En juillet 2017, Chen Wei, le producteur de la première édition de l’émission de télé-réalité ‘The Rap of China’ qui fut remportée par PG One déclarait pourtant : « En Chine aujourd’hui, la culture hip-hop est synonyme de tendance et de toute la it culture. »
Il faut croire que cette tendance n’aura pas fait long feu, en tous cas dans les médias, et ce à cause d’artistes comme PG One et de l’étroitesse d’esprit des autorités chinoises.
Derrière cette décision dont on peut penser qu’elle n’améliorera pas la perception et le traitement des immigrants et immigrés noirs en Chine, certains trouveront peut-être leur consolation dans l’absence possible d’appropriation de la culture des Noirs en Chine.