Séparés pendant le génocide tutsi, un père et sa fille se retrouvent 23 ans après

Leonard Sebarinda et sa fille Jeanette Chiapello ne s’étaient pas revus depuis la tragédie du génocide tutsi en 1994. Elle était alors âgée de deux ans.

Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr

Dans le chaos du génocide tutsi de 1994, Leonard Sebarinda, son épouse s’étaient réfugiés à deux endroits différents de Kigali, emmenant chacun avec eux une partie de leurs enfants. La mère, qui avait pris avec elle sa fille Beata, sa soeur jumelle et son frère s’était réfugiée dans la désormais tristement célèbre église Nyamata. Les assaillants massacrèrent toutefois 10000 des personnes s’y réfugiant, incluant la mère de Beata, son frère et sa soeur.

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Mémorial de Nyamata consacré aux victimes du génocide tutsi dans l’ancienne église de Nyamata

Lorsque des villageois découvrirent la petite Beata alors âgée de seulement deux ans en vie à côté des cadavres de sa mère, de son frère et de sa soeur, ils la placèrent dans un orphelinat. Son père Leonard Sebarinda finit par retrouver sa fille et l’y laissa brièvement afin d’effectuer les démarches permettant de la récupérer. A son retour toutefois, la petite Beata avait été placée sur une liste d’enfants à adopter et envoyée en Italie. N’ayant pas plus d’informations sur les aboutissants de sa fille, Leonard Sebarinda s’était résolu à ne plus jamais la revoir.

Une fois en Italie, Beata fut adoptée par une famille italienne sous le nom de Jeanette Chiapello. Le père et ses enfants au Rwanda furent contraints à l’ignorance du sort de leur fille et de leur soeur pendant de nombreuses années. Quant à Jeanette Chiapello, qui se pensait orpheline, elle  avait intériorisé la coupure définitive d’avec ses racines. Cette barrière allait être surmontée par le frère de Jeanette Chiapello, Vincent Twizeyimana, qui vers 2007 environ, avait entrepris de retrouver sa soeur perdue. Au terme d’un véritable travail de détective, il parvint à retrouver le nouveau nom de sa soeur et son courriel. Toutefois, cette dernière, convaincue d’être une orpheline, resta hermétique aux approches de celui qu’elle ne pensait pas pouvoir être son frère.

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Vincent Twizeyimana(à gauche)
Crédit Photo: Kigali Today

Plusieurs années plus tard, ce fut au tour de Jeanette de contacter Vincent sur les réseaux sociaux, lui faisant savoir sa volonté d’en savoir plus sur ses origines rwandaises. Les deux acceptèrent de faire l’objet d’un test ADN. Celui-ci révéla qu’ils étaient bel et bien apparentés.

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Jeanette Chiapello et son époux Crédit photo : Cyril Ndegeya

Le mois d’octobre 2017 marqua le retour de Jeanette, désormais mariée à un Italien et mère de deux enfants, dans son pays natal. Elle y vit pour la première fois son père depuis 23 ans. Ce dernier, dans le cadre d’une cérémonie naturellement émouvante, put reproduire ce dernier regard et ce dernier baiser qu’il avait espéré, puis perdu l’espoir de pouvoir reproduire lors des vingt-trois dernières années. Malgré sa croyance en la fatalité qui l’avait déjà privé de sa femme et de deux de ses autres enfants, cet espoir n’avait pourtant pas disparu, façonnant la croissance du bébé qu’il avait laissé derrière lui à l’orphelinat, qui était depuis devenu une femme et une mère et qu’il pouvait à nouveau tenir dans ses bras.

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Les retrouvailles de Jeanette et de son père Leonard Crédit Photo : Cyril Ndegeya

 

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