Le Bogolan, ce tissu emblématique de la culture malienne

Le Bogolan est un tissu traditionnel devenu un symbole de l’identité culturelle malienne.

Le Bogolan ou Bògòlanfini [1] est un tissu en coton originaire du Mali, traditionnellement fait à la main et teint à l’aide de boue fermentée. La technique de fabrication du Bogolan est usitée par de nombreux groupes ethniques du Mali, cependant, c’est le modèle Bambara, ce peuple Mandingue d’Afrique de l’Ouest sahélienne qui est devenu le plus célèbre à travers le monde.  Dans la culture malienne traditionnelle, héritière de l’Empire médiéval du Mali, le Bògòlanfini était porté par les chasseurs. Ils s’en servaient comme camouflage ou protection rituelle. Il est aussi de coutume de dire que ce tissu a le pouvoir d’absorber les forces dangereuses libérées lors d’un accouchement. 

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Au Mali, le Bògòlanfini est porté par des personnes de toutes les ethnies, notamment dans le cinéma malien et par les musiciens maliens comme expression d’identité nationale ou ethnique. Ce tissu était particulièrement populaire parmi les jeunes. Il a d’ailleurs fini par être transformé en un large éventail de vêtements et accessoires.  Les différents designs du Bògòlanfini revêtent une importance culturelle considérable puisqu’ils se réfèrent à des événements historiques (batailles anti-coloniales), mais aussi aux crocodiles, animaux de la mythologie Bambara ou encore à des proverbes. Le Bògòlanfini, est traditionnellement tissé par les hommes, la gente féminine prenant en charge quant à elle la teinture du tissu. À l’origine, cette étoffe ouest-africaine était réalisée sur des métiers à tisser. Il s’agissait généralement de bandes de coton d’environ 15 centimètres cousues les unes aux autres formant ainsi un tissu d’environ 1 mètre de largeur et 1,5 m de longueur. 

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La technique de fabrication du Bogolan 

  1. Le tissu est trempé dans un bain de teinture à base de feuilles de l’arbre N’gallama (le bouleau d’Afrique) réduites en purée, bouillies ou trempées. 
  2. Le tissu, devenu jaune, est séché au soleil. 
  3. Le tissu est peint à plusieurs reprises, à l’aide de morceaux de métal ou de bois afin de réaliser des motifs complexes. 
  4. Une boue spéciale (fermentée) est appliquée sur le tissu teint. La réaction chimique entre la boue et l’étoffe teinte conserve la couleur brune après que la boue ait été retirée. 
  5. Le colorant jaune obtenu à partir du N’gallama est retiré des parties non peintes du tissu et le rend blanc. 

Cette méthode est toujours utilisée dans la commune de San, dans la région de Ségou au Mali, qui est le centre traditionnel de la production de Bògòlanfini. Il s’agit d’une technique fastidieuse permettant l’obtention d’une palette de bruns pour les parties peintes. Cependant, les progrès techniques actuels facilitent le procédé de fabrication. 

En effet, aux environs de Mopti et de Djenné, une méthode plus simple est utilisée : 

  1. Le tissu est teint en jaune grâce à une solution de Wolobugun, fabriquée à partir des feuilles de Terminalia avicennoides (une sorte de plantes qui pousse dans les régions tropicales). 
  2. Le tissu est peint avec des motifs noirs. 
  3. Le jaune est soit retiré, produisant un design noir et blanc brillant ou peint en orange foncé avec une solution d’écorce de M’Peku. 

Du fait de la simplification du procédé de fabrication, depuis le début des années 2000, la production de Bògòlanfini s’est envolée de manière exponentielle. Ce tissu emblématique du Mali s’exporte désormais dans le monde entier. Il est tout de même important de rappeler que les motifs actuels utilisent des dessins plus simples, souvent réalisés avec des pochoirs. L’utilisation de cette méthode a permis de démultiplier le rendement. 

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Moussa Traoré, président de la République du Mali de 1968 à 1991.

Les réformes démocratiques après le renversement de Moussa Traoré, qui avait lui-même renversé le président Modibo Keïta en 1991, ont mené de nombreux Maliens à perdre leurs emplois de fonctionnaires ou, pour les plus jeunes d’entre eux, leurs bourses d’études. Cette situation inconfortable a rapidement entraîné la reprise de la production de Bògòlanfini.

Le bogolan à la conquête du monde

De nos jours, le Bògòlanfini s’exporte à travers le monde. Il est notamment très populaire au sein de la communauté afro-américaine. Le domaine de la mode et de la haute couture se sont aussi largement inspiré de ce tissu traditionnel malien. Des artistes comme Chris Seydou ont participé à rendre ses lettres de noblesse à ce symbole culturel malien à travers leurs collections. 

 

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Notes et références

[1] le terme »bògòlanfini » est un composé de « bogo« , qui signifie « terre, boue« , de « lan« , signifiant « avec, au moyen de » et de « fini« , signifiant « tissu« . bògòlanfini signifie donc littéralement «tissu avec de la boue».

Mathieu N'DIAYE
Mathieu N'DIAYE
Mathieu N’Diaye, aussi connu sous le pseudonyme de Makandal, est un écrivain et journaliste spécialisé dans l’anthropologie et l’héritage africain. Il a publié "Histoire et Culture Noire : les premières miscellanées panafricaines", une anthologie des trésors culturels africains. N’Diaye travaille à promouvoir la culture noire à travers ses contributions à Nofi et Negus Journal.

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