« L’orage africain-un continent sous influence » est le troisième film du réalisateur franco-béninois Sylvestre Amoussou. Récompensé par l’étalon d’argent au Festival du film panafricain (FESPACO) 2017, ce long-métrage coup de poing met les pieds dans le plat en abordant frontalement la question de la souveraineté africaine. Au cinéma le 1er novembre à l’espace Saint-Michel à Paris.
L’inévitable bras de fer
Le film place l’intrigue dans un scénario fictionnel réaliste et actuel. En effet, le président du Tangara, Ezo Essogbé, décide de reprendre en main le destin de l’Afrique en nationalisant l’exploitation les ressources naturelles du pays. Ainsi, la richesse générée par l’exploitation de ces dernières reviendrait a désormais à la population. Un acte révolutionnaire pour restaurer la souveraineté d’une ancienne colonie consciente et désireuse de se défaire de l’emprise de l’Occident. Le président Essomé, démocratiquement élu, a une vision, un projet et un amour profond pour sa nation. Ce positionnement fera de lui un courageux et surtout téméraire dirigeant panafricain. Toutefois, cette décision en fera également et nécessairement l’ennemi des européens. Car les multinationales occidentales usent du vieux continent comme d’une vache à lait depuis plusieurs siècles. Dans ce contexte, mondialisation rime avec françafrique et ceux qui profitent de cette situation ne sont pas prêts à envisager les états africains comme des partenaires égaux. Aussi, le combat du président Essogbé, de son gouvernement et de ses citoyens les plus patriotes, va être de tenir le cap et de rester vigilent face aux forces qu’ils ont déchaînées.
Un refrain franco-africain populaire
Face à ce tournant inattendu, les grandes entreprises vont faire entrer en jeu leur carte maîtresse : madame Afrique. Personnage incontournable des relations sulfureuses entre le vieux contient et le monde blanc, cette femme est le plus féroce négociant au service des multinationales. Grâce à des fonds illimités et un réseau officieux, elle a pour mission d’empêcher ces états de prendre leur indépendance économique. Accoutumée des collaborateurs africains peu scrupuleux, cupides et en mal de pouvoir, cette miss françafrique sait mettre les dirigeants courageux à genoux. Dans ce cas très inattendu de résistance, sa mission consiste à saboter les velléités d’émancipation en organisant le chaos, la guerre civile. Une vielle rengaine efficace du diviser pour mieux régner. Le film pointe également la responsabilité de ces complices africains que l’argent achète à modiques sommes et sans qui le plan ne pourrait fonctionner. Dans une configuration où le chef de l’état veut jouer son rôle, les traîtres font toujours partie du cercle le plus proche. Les institutions internationales y tiennent elles aussi une part importante de responsabilité. Entre auto-détermination et profit, la bataille s’engage et l’issue de l’affrontement est un message d’espoir pour ceux qui aspirent à une Afrique libre.
Dans l’ère du temps
Sylvestre Amoussou est un réalisateur militant qui a habitué le public à des films revendicateurs. Après le choc de son premier long-métrage, Africa Paradis, il poursuit sur le thème délicat des relations de vampirisation qu’entretient l’Europe avec l’Afrique. C’est donc naturellement que « L’orage africain-un continent sous influence », s’inscrit dans l’ère du temps. En effet , à l’heure où la remise en question de la main-mise de l’occident sur l’Afrique gagne les premiers concernés et où la lutte pour le retrait du Franc CFA se durcit, le dernier film de Sylvestre Amoussou est criant de réalisme. Il aborde sans filtre, fidèlement au style du téméraire scénariste, l’affrontement inéluctable entre les partisans d’un nouveau rapport du continent avec l’extérieur et les défenseurs d’un modèle vétuste et archaïque. « L’orage africain » est truffé d’allusions aux révolutionnaires d’Antan qui ont incarné le même rêve qu’Ezo Essogbé. Si tout sonne juste, c’est aussi grâce à la justesse du casting, qui réunit une fois de plus les acteurs fétiches de Sylvestre Amoussou. On y retrouve Eriq Ebouaney, qui tient un rôle dans chacune de ses réalisations ; Sandrine Bulteau, qu’on a pu voit également dans « Africa Paradis » et livre ici une performance très convaincante dans le rôle de madame Afrique; ainsi que Sandra Adjaho (Un pas en avant-les dessous de la corruption); Philippe Catroit et Laurent Mendy (Arthur et les Minimoys 3). Récompensé par l’étalon d’argent au Fespaco 2017 et après une tournée internationale, « L’orage africain-un contient sous influence » sortira en salle le 1er novembre.