Joel Camargo, le destin tragique du premier joueur brésilien à avoir évolué au PSG

Joel Camargo (1946-2014) était un joueur de football brésilien, champion du monde en 1970. Premier joueur brésilien à évoluer au PSG, il fut aussi le premier joueur international noir de ce pays à dénoncer le racisme au Brésil.

Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr

En août 2017, le footballeur brésilien Neymar intégrait le club français du Paris Saint Germain.

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Neymar

Par là, il emboîtait le pas à une longue liste de joueurs originaires de son pays ayant porté les couleurs de l’équipe parisienne dont le premier était Joel Camargo. Bien que se trouvant aux deux extrémités d’une même liste, les profils des deux joueurs apparaissent comme fort différents en bien des aspects. Neymar est attaquant et Joel était défenseur. Alors que le nom de Neymar est associé au transfert le plus onéreux de l’histoire et au luxe le plus ostentatoire, Joel Camargo est mort il y a quelques années dans le dénuement et l’oubli les plus totaux. Enfin, alors que Neymar est connu pour son refus de s’identifier comme un Afro-Brésilien et à prendre position sur la question du racisme au Brésil, Joel Camargo fut le premier joueur international brésilien à s’exprimer publiquement sur la question du racisme dans son pays.

En 2010, interrogé par un journaliste brésilien qui lui demandait s’il avait déjà été victime de racisme, Neymar avait répondu :

« Jamais, que ce soit sur le terrain ou en dehors. Peut-être parce que je ne suis pas Noir n’est-ce pas? ».

La réaction peut paraître surprenante au vu d’un phénotype comme celui de Neymar dans un pays où des étudiants se font passer pour des Noirs pour intégrer des universités via des politiques de quotas. On admettra qu’on ne peut pas forcer un individu à adopter une identité ethno-raciale qui n’est, il faut l’admettre, pas toujours basée sur une réalité biologique.

En 2011, lors d’un match avec l’Ecosse, Neymar était ciblé par un jet de banane par un spectateur. Interrogé sur l’incident à la fin du match, Neymar déclara: « Nous sommes très attristés. Il est préférable de ne pas évoquer le sujet ».

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La texture originelle des cheveux de Neymar

Ce qui pose problème donc problème avec Neymar n’est donc pas son refus de se plier à des catégories ethniques créées par la société, mais son refus s’exprimer sur le sujet.

En cela, Neymar diffère grandement de Joel Camargo. Ce dernier déclarait en effet, dans une interview en 2014, quelques mois avant sa mort : “La discrimination existe et je l’ai toujours dit. (…) J’étais le seul à parler de la discrimination à cette époque. Mes coéquipiers me disaient que j’étais trop radical et m’ont demandé de garder ces choses pour moi. J’avais été interviewé par des gens qui voulaient que je dise qu’il n’y avait pas de discrimination au Brésil. Je leur ai dit : ‘N’importe quoi, Je suis Noir! Je sais comment les choses se passent ».

Cette prise de position publique, Joel Camargo l’avait payée au prix fort après un accident dans lequel il conduisait et qui coûta le vie à deux jeunes femmes qui l’accompagnaient. Lui même gravement blessé, emprisonné, accusé à tort de conduite en état d’ivresse, il affirmera avoir alors « été crucifié à cause de sa couleur ». Après avoir été incarcéré, son contrat avec son club de Santos fut résilié.

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Boycotté par les clubs brésiliens, il relança sa carrière en France, sur recommandation de son ancien coéquipier Pelé au Paris Saint Germain, un jeune club fraîchement promu en Ligue 1.

Mais la malédiction qui s’était abattue sur Joel Camargo n’allait plus le quitter. Après avoir grondé ses coéquipiers sur le terrain à cause de leur manque de niveau, il se vit mis à l’écart. Il n’aura joué que deux matches.

A son retour au Brésil, il ne jouera que dans des petits clubs avant de se retirer du sport dont il était à présent dégoûté.

Très vite, il dépensa tout son argent à cause d’investissements ratés dans l’ immobilier et d’une addiction aux jeux, allant jusqu’à vendre ses médailles pour survivre avant d’accepter un travail dans les docks. Auprès de ses collègues de travail, il allait nier être cette ancienne star qu’il avait désormais honte d’affronter. Sombrant dans l’alcoolisme et souffrant du diabète, il allait devoir être amputé d’un orteil, celui la même qui contribuait tant à son talent de défenseur.

Joel Camargo décédera en 2014 dans l’oubli quasi-total et loin de la célébrité de ses autres coéquipiers champions du monde en 1970 comme Pelé. En quelques mois, son armure de champion du monde fissurée par un accident de la route l’avait laissé vulnérable face à l’extrême violence d’une société envers une personne qui avait osé dénoncer ses injustices. Il avait progressivement tout perdu, de son statut à ses médailles en passant par l’un des doigts de son pied. Cette violence, on comprend que certains, comme Neymar, cherchent à s’en protéger en niant le racisme et en dépensant tant d’argent pour se défriser et / ou s’éclaircir les cheveux. Elle ne pourra toutefois pas nous empêcher de rendre hommage à ceux qui, par leur courage, les préjugés liés à leur couleur de peau et leur malchance, en ont été victimes.

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Joel Camargo (1946-2014)


Références

https://brasil.elpais.com/brasil/2017/08/03/deportes/1501788594_350773.html

http://www.paris-canalhistorique.com/joel-camargo-le-destin-brise-du-premier-bresilien-du-psg/

http://www.revistabula.com/2502-neymar-e-o-racismo-uma-tragedia-em-quatro-atos/

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