Lassana Bathily, Ludovic Boumba, Emmanuel Toula, trois jeunes héros, qui, en France, malgré leur condition de « bamboulas », ont agi d’instinct pour porter secours à autrui. Trois noirs qui viennent compléter une liste bien longue d’hommes sacrifiés sur le sol français. Pourtant, leurs actes n’ont pas suffit à permettre cette utopique acceptation du citoyen non-blanc. Car bamboula tu es aux yeux de l’empire, bamboula à ses yeux tu demeureras.
D’abord, il y eu les tirailleurs sénégalais. Héros contraints puis destitués. Aux temps pas si lointains de la colonisation, la France avait mobilisé des Africains dans ses territoires assiégés pour les faire combattre en première ligne durant les deux guerres mondiales. Ils n’eurent pas le choix d’accepter ou de refuser la proposition mais, ils participèrent à ces conflits qui ne les concernaient pas et permirent à l’Empire de s’ériger parmi les victorieux. Lors de la Seconde guerre mondiale (1939-1945), ils contribuèrent majoritairement à libérer la république du nazisme. Ce jour béni de la libération, on avait demandé aux soldats noirs de donner leurs uniformes aux soldats blancs, afin que ces derniers soient couverts d’honneur. En effet, les Etats-Unis, partenaire et patron de la France, faisaient pression sur celle-ci afin qu’elle soit plus dure avec ses bamboulas. Car eux-mêmes pratiquaient la Ségrégation au sein de leurs rangs. L’oncle Sam et sa mère l’Angleterre, avaient donc sommé Marianne de faire de ce 25 août 1944 une date de victoire oui, mais exclusivement blanche. Pourtant, les noirs représentaient près des 2 tiers des forces françaises libres. Occultés de la mémoire collective officielle, ils ne reçurent pas les fameuses pensions militaires auxquelles ils avaient pourtant droit. En revanche, ils inspireront le personnage de la marque de cacao en poudre « Banania« .
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Quelques années plus tard, ces mêmes africains noirs seraient racolés par le pays des droits de l’homme pour venir paver les rues Parisiennes. On les installerait alors dans des cités-dortoirs, en périphérie de la capitale, afin qu’ils vivent entassés et à distance raisonnable des « bonnes-gens ». Par humanité, on leur permettrait tout de même de vivre la grande aventure entourés des leurs, grâce au regroupement familial (qu’on regretterait aussitôt que l’économie flancherait). En 1953, on solliciterait encore des bamboulas, dans les départements outre-mer cette fois. Le pays étant gravement frappé par une crise démographique, on ferait venir des antillais et des réunionnais via le Bumidom.
Ce sont les enfants de tous ces travailleurs exploités qui aujourd’hui sont français parce que nés sur ce territoire. Ce sont ces mêmes enfants qui, étrangement, doivent encore se justifier voire s’excuser d’être là. Et cela quel que soit leur contribution. Bamboula ton père était, Bamboula tu resteras.
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L’un était sans papiers….
Lassana Bathily, immigré malien, a sauvé la vie de plusieurs citoyens français de confession juive dans un supermarché de la chaîne « Hypercasher ». Il a leur a permis de se réfugier dans la chambre froide du magasin, afin d’échapper à l’assaillant Amedy Coulibaly. Il a ensuite pu sortir discrètement pour communiquer des informations au RAID et au GIGN. Pour son acte de bravoure, il a été félicité par le président François Hollande puis reçu au ministère de l’intérieur. Le 20 janvier, son acte de bravoure fut récompensé par l’attribution de la nationalité française, celle pour laquelle des millions d’Africains bravent les mers.
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Ludovic Boumba était ingénieur informatique à l’aéroport de Roissy. Le 13 novembre 2015, en compagnie d’amis il fêtait un anniversaire, installé à la terrasse du restaurant « La belle équipe » rue de Charonne. A 40 ans, le lillois d’origine congolaise, s’était installé dans la capitale à la fin des années 1990 pour des raisons professionnelles. Il aimait le football et le rap, qu’il avait lui-même pratiqué un temps en amateur. Ce jour là, Ludovic mettra fin à sa propre vie dans un geste instinctif de protection…de son amie. Ludovic, qui manque cruellement à ses amis et ses 6 frères et sœurs, s’était mis devant Chloé, pour la protéger des balles des terroristes, qui s’invitèrent à la fête cette fin d’après-midi.
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Emmanuel Toula, 16 ans, s’était rendu à Bobigny (Seine-Saint-Denis) samedi 11 février pour la manifestation contre les violences policières. En effet, suite à l’interpellation musclée et au viol de Théo, jeune résidant d’Aulnay-Sous-Bois. Lors de ce rassemblement, des casseurs sont entrés dans la danse et ont vandalisé les alentours, incendiant plusieurs véhicules et commerces. En marge du rassemblement, une automobiliste arrive à bord de sa citadine et en compagnie de ses deux enfants. Son véhicule est pris à partie. Apeurée, elle sort de la voiture en prenant son fils avec elle. Affolée, elle oublie sa fille dans le véhicule et c’est après avoir fait quelques pas pour se mettre à l’abri, qu’elle se rend compte qu’un des enfants manque à l’appel. Elle demande autour d’elle en donnant le signalement de l’enfant. Emmanuel, qui lui aussi s’était écarté des débordements, aperçoit la voiture en feu et la fillette terrorisée. Il ouvre la portière, la détache et la sort in extremis. Dans la soirée, la préfecture de police de Paris s’attribuera le sauvetage. Heureusement, justice et gloire seront rendues à l’adolescent grâce aux nombreux démentis et témoignages de manifestants, poussant la police à rétablir la vérité.
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Tous ces héros des temps modernes sont des hommes noirs, oui, des hommes au sens humain et biologique du terme, de carnation noire. Non pas des bamboulas, avec tout le mépris que ce terme implique. Il est donc important d’éviter le piège républicain : il n’ y a pas de « bon Noir » comme on l’a dit pour Théo ou de « mauvais Noir » comme on a tenté de le faire croire pour Adama. D’autant que le parti est déjà pris et que, pour autant de Lassana et d’Emmanuel qu’on érige en exception, on insistera toujours (et plus longtemps) sur un Amedy Coulibaly ou un Youssouf Fofana qui eux, serviront de référence caractéristique du Noir de France.