Les Noirs américains sont associés à tort, depuis depuis plus d’un siècle, à la consommation de pastèques. A l’origine de ce cliché reposent des considérations racistes.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr
En 2003, l’écrivain Gaston Kelman rappelait, par le titre de son best-seller de livre, que contrairement aux idées reçues, tous les Noirs n’aimaient pas le manioc. Et si cette idée reçue sur l’alimentation des Noirs est basée sur une relative réalité culturelle, beaucoup d’autres sont loin de l’être. C’est le cas de la pastèque à laquelle les Noirs américains sont associés depuis la deuxième partie du 19ème siècle.
Aliment traditionnel du sud des Etats-Unis, il était consommé à la fois par les Blancs et par leurs esclaves noirs. Après la guerre civile et la fin de l’esclavage, et à travers les ministrels, ces shows musicaux où des comédiens, souvent des Blancs au visage peint en noir, il allait etre plus rapidement associé aux Noirs, désormais présentés comme des créatures oisives incapables de se passer de ce fruit associé avec la pratique quasi-enfantine du manger avec les mains. Dans l’imagerie populaire, l’association des Noirs avec la pastèque allait etre favorisée par les couleurs du fruit, qui rappelleraient celles du Noir stéréotypique à la peau noire charbon, aux lèvres rouges et à la dentition blanche porteuse d’un sourire niais.
Très tot, les Afro-Américains résistèrent à la diffusion de ce stéréotype dégradant. C’est ainsi que lors de l’Exposition Universelle de Chicago en 1893, alors que des membres de l’organisation de l’événement cherchaient à attirer le public noir avec des concerts et une distribution de pastèques gratuites, la communauté noire de la ville boycotta l’événement.
Plus d’un siècle plus tard, le stéréotype n’a pas disparu. Alors que le premier Président noir des Etats-Unis a été élu, symbolisant en principe le passage de Noirs des bas-fonds de la société à son sommet, Barack Obama a à plusieurs reprises été le sujet de caricatures le mettant en scène avec des pastèques. Comme si la lumière des spotlights et le crépitement des flashs prometteurs d’une admiration et d’un respect dans la société dont sont aujourd’hui sujets les Noirs américains n’avaient pas effacé les clichés dont ils étaient depuis si longtemps prisonniers.