Grégoire Kayibanda et l’indépendance du Rwanda

Grégoire Kayibanda naît  le 1er mai 1926 à Tare, dans le sud du Rwanda. Destiné à une carrière de prêtre, il quitte finalement le Grand séminaire pour l’enseignement. Puis très vite, arrive la vie politique.

En plus de l’histoire et du français, Grégoire Kayibanda est chargé d’enseigner la religion. Membre de l’AMR, une association de moniteurs catholiques et de parents d’élèves, il écrit pour la revu « Eduquer pour Dieu » (Kurerera Imana).

En 1952, il prend la tête de la Légion de Marie, mouvement d’action catholique. C’est par le biais de ce rassemblement qu’il commence à mener des actions sociales et militantes, sous couvert de la parole sainte. L’année suivante, il est affecté au Bureau de l’inspection des écoles. Il continue d’écrire mais pour une autre revue cette fois, l’Ami, fondée par un prêtre en 1945 et référence des intellectuels rwandais. Il en devient le rédacteur en chef, ce qui lui donne une influence considérable sur les esprits et l’accès à des documents importants concernant l’Eglise catholique. A partir de là, il commence à dénoncer les inégalités sociales et l’exclusion des rwandais hutus.

Toujours en 1953, Kayibanda est élu au Conseil de la chefferie puis, du Territoire. Il veut le changement par l’action et par le biais d’associations, seulement, la législation interdit aux citoyens de mener des actions politiques et de se regrouper en associations à cet effet.

En 1955, sa carrière de rédacteur et de politicien prend encore de l’ampleur lorsqu’il rejoint l’équipe rédactionnelle de l’unique journal politique du pays, édité en Kinyarwanda, la langue locale. Ce journal catholique, Kinyamateka, est également dirigé par un homme d’église et s’inscrit dans un courant de revendication, de soif de changement. Les autorités coloniales voient d’un très mauvais œil cette embauche, qui apparaît comme une validation des idées séditieuses de Grégoire Kayibanda par l’Eglise.

 

1957 est une année charnière pour la politique rwandaise. En 1957, avec d’autres démocrates, il fonde le Mouvement social Hutu (MSH) et devient membre de la coopérative Travail, Fidélité, Progrès (Trafipro). La même année, un vicaire belge l’envoie en stage de journalisme à Namur (Belgique) afin qu’il perfectionne ses aptitudes. Il doit être formé par le journal. Vers l’avenir, et rentrer pour reprendre ses fonction à Kinyamateka.

 

La colonisation devient de plus en plus pesante, et cela pour l’ensemble des citoyens rwandais. Il s’agit pour les Tutsis de dénoncer le racisme des colons blancs envers les indigènes noirs et de leur domination sur la population, dans un document qu’ils rédigent en 1957, Mise au Point. Pour les Hutus, il s’agit de dénoncer un  « colonialisme à double étage », par la domination de la minorité Tutsi sur les hutus et de celle des belges sur les tutsis et les hutus, dans un manifeste répondant à Mise au point, le Manifeste Bahutu.

En 1958, en plus d’avoir repris son poste à Kinyamateka, il devient président de la Trafipro. Le 4 novembre, l’administration coloniale reconnaît officiellement la Légion de Marie en tant qu’association, Kayibanda en redevient le président national. Gagnant en notoriété et en crédibilité, il crée le 26 septembre 1959 le Parti du Mouvement de l’Emancipation des Hutus (Parmehutu). Un parti politique pour le rassemblement et la revalorisation des hutus, mais aussi des tutsis et des twa pauvres, exposés aux mêmes difficultés que les hutus.

La première vague de violence s’étend sur le pays après la supposée agression d’un sous-chef hutu par des tutsis. Le soir même, les tutsis sont victimes de représailles. A partir de là, le sous-establishment tutsi décide de détruire le Parmehutu, beaucoup de leaders hutus sont assassinés. Toutefois, la violence va monter d’un cran lorsque l’administration coloniale belge va satisfaire les revendications du parti de Kayibanda. Le 25 décembre 1959, elle de réforme la politique par l’abolition définitive de la domination tutsi. Vint alors une refonte des sous-chefferies en communes (229), des élections communales furent fixés dans un délai de six mois. Un retournement d’alliance qui va définitivement enraciner la haine entre les deux clans.

Le 6 juin 1960, le Parmehutu devint le Mouvement démocratique républicain-Parmehutu (Mdr-Parmehutu), qui remporta les élections haut la main et mit fin à la monarchie belge et à la sous-monarchie tutsi. Grégoire Kayibanda devient Premier ministre, lui et son parti sont chargés de préparer la transition. Après réunion, le modèle de république fut adopté par la majorité : Kayibanda fut officiellement réinvestit comme Premier ministre, et Dominique Mbonyumutwa (ex sous-chef agressé par des tutsis en 1959) investit comme président. Le Mdr-Paramehutu remporte également les élections législatives et s’attèle à la conception d’une nouvelle constitution, qui définit un fort pouvoir du président, à la fois chef d’Etat et chef du gouvernement. Le président effectuera un mandat de 4 ans, renouvelable 3 fois maximum avec une limite d’âge de 60 ans.

Le 1er juillet 1962, le Rwanda accède à son indépendance.

En 1973, la Constitution est modifiée et la durée du mandat passe de 4 à 5 ans, la limite d’âge est supprimée. Pourtant la gouvernance va mal, le pays est rongé par des rivalités régionales, entre nord et Sud, et désormais ethniques, entre Hutus et Tutsis. Le sort des Hutus du Burundi, persécutés par le pouvoir Tutsi en place, affecte également la stabilité au Rwanda. Des luttes claniques et intestines qui finissent par appauvrir définitivement le pouvoir de Grégoire Kayibanda, qui est renversé le 5 juillet 1973 par Juvénal Habyarimana, son ministre de la Défense.

Kayibanda fut assigné à résidence puis, condamné à mort par la cour martiale le 29 juin 1974. Finalement, sa peine est changée en réclusion à perpétuité.

Grégoire Kayibanda mourut à son domicile de Kavumu, au petit matin, le 15 décembre 1976.

SK
SK
SK est la rédactrice/ journaliste du secteur Politique, Société et Culture. Jeune femme vive, impétueuse et toujours bienveillante, elle vous apporte une vision sans filtre de l'actualité.

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