Une magnifique chanson wolof rapportée à Gorée dans la deuxième moitié du 18ème siècle donne la parole aux Africains privés de leurs êtres chers à cause de la Traite des Noirs.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr
Marin et scientifique français au service du roi de France, Verdun de la Crenne dirige une expédition scientifique dans le monde en 1771 et qu’il publie dans un ouvrage intitulé ‘Voyage fait par ordre du Roi en 1771 et 1772, en diverses parties de l’Europe, de l’Afrique et de l’Amérique’ en 1776. S’arrêtant dans l’actuel Sénégal dont il décrit les moeurs et certaines des langues, il a aussi rapporté, de la part de l’un de ses informateurs locaux sur l’île de Gorée, une chanson en wolof. Elle décrit de manière émouvante cette voix inconnue du grand public, celle des Africains déchirés par la perte via la traite des Noirs d’un de leurs êtres chers. Une voix inconnue et tue par la survie des seuls écrits des négriers et où les mentions de gains financiers et de captifs, comme appliquant la maxime ‘seuls les écrits restent’ ne donnent une mémoire qu’aux Noirs devenus esclaves et à ceux ayant contribué à les réduire à cette condition.
Le Damel (roi de Cayor) a pillé le village de Yéné
Il a fait captive la femme que j’aime
Depuis lors j’ai tant de chagrin
Que je ne peux plus boire de vin de palme
Ni manger de couscous
La femme que j’aime sera embarquée pour aller (aux Amériques) dans les îles
Je vais demander à être réduit en esclavage avec elle
Je préférerais être esclave à ses côtés
Je préfère être esclave à ses côtés que libre sans elle.
La résistance à l’esclavage des Wolofs de Sénégambie sur le continent américain