Les Mégalithes de Sénégambie

Les mégalithes de Sénégambie consistent en 30000 constructions en pierre latérite réparties sur plus de 30000 km2 sur les actuels sud du Sénégal et de la Gambie. Récemment classés dans la liste du Patrimoine de l’Humanité par l’UNESCO, leurs bâtisseurs et leurs origines restent mystérieux.

Par Sandro CAPO CHICHI / Nofipedia

Origines

Les mégalithes auraient été bâtis entre 1300 avant notre ère et le 14ème (ou 15ème) siècle de notre ère. L’identité des bâtisseurs des mégalithes et leur relation avec les populations modernes de la région sont obscures. Alors que les premiers chercheurs européens du début du 20ème siècle rattachaient la création de cette civilisation trop brillante pour avoir été créée par des Noirs à des Blancs mythiques comme les Carthaginois, les Juifs ou les Romains, des études plus récentes sur les restes humains dans la région ont montré qu’elle fut bien l’oeuvre de Noirs africains.

mégalithes de sénégambie
Crédit Photo : Pall Stefansson / OUR PLACE

Des comparaisons entre quelques échantillons de ceux-ci et des Sérères et des Wolofs modernes suggère qu’il s’agirait de populations très proches morphologiquement. Toutefois, la pratique de la mutilation dentaire observée dans les restes de ces populations se retrouve plutôt chez des populations comme les Bassari du Sénégal. Aucune de ces populations vivant dans la région actuellement, comme celles déjà citées, ou comme les Diola, les Mandingues ou les Peuls, ne se réclament toutefois de manière cohérente de la création de ces artefacts. Pour certains, les mégalithes auraient toujours été là ; pour d’autres, il s’agirait de cimetières royaux ; d’autres n’ont  aucune explication à fournir sur leurs origines. Ils sont toutefois toujours utilisés pour célébrer les récoltes par le biais de sacrifices aux ‘esprits de la terre’.

mégalithes de sénégambie

Alors qu’on pourrait attendre que cette tradition eût été l’évolution d’une culture l’ayant précédée, aucun élément n’a jusqu ‘à présent montré l’existence d’un tel antécédent. La question de l’origine des créateurs de cette culture, qui seraient donc des  immigrants reste alors entière. Aussi fragile que cette hypothèse soit à l’heure actuelle, notons qu’a été émise l’hypothèse d’une migration à partir d’Egypte qui daterait, selon un chercheur, avant  le 6ème siècle avant notre ère, sur la base de traditions orales consignées à la période coloniale. Elle n’a toutefois pas été datée, et le fossé temporel entre le sixième et le treizième siècle semble empêcher l’identification entre migrants égyptiens de cette tradition orale et bâtisseurs des mégalithes sénégambiens.

La fin de la culture des mégalithes de Sénégambie

La culture des mégalithes de Sénégambie prend fin aux alentours du 14ème et du 15ème siècle de notre ère. Comme pour leurs origines, si les bâtisseurs des mégalithes de Sénégambie étaient restés sur place après la fin de cette tradition,  on devrait trouver des traditions témoignant d’un savoir-faire hérité d’eux. Ce n’est pas le cas et diverses hypothèses ont été évoquées pour justifier la fin de cette culture et la disparition de ces populations. On a ainsi parlé d’importants remplacements de populations, d’épidémie, voire de génocide. La solution évoquée restant la plus probable reste un tabou culturel qui aurait entraîné les populations de la région à cesser de bâtir des mégalithes et de mobiliser le savoir-faire nécessaire à leur création.  Il pourrait notamment s’agir de l’islamisation de la région.

La nature

Allant jusqu’à  2,50 à 3 mètres de hauteur, les monolithes étaient construits à la suite d’un rigoureux procédé comprenant l’extraction à partir de carrières de latérite, une roche sédimentaire, le taillage des monolithes; leur sculpture particulière; leur transport et leur placement dans les ensembles de mégalithes. Ceux-ci pouvaient prendre la forme de cercles de monolithes ou d’autres ne comprenant qu’un  monolithe et composées d’autres structures, comme des tumuli de pierres. Les cercles de monolithes se retrouveraient de manière très fréquente autour des deux rivières Bolong, deux affluents du fleuve Gambie.

mégalithes de sénégambie
Crédit Photo : Ji-Elle

Sur les monolithes, qui étaient de forme cylindrique ou de forme quadrangulaire ou cylindrique, on trouve des sculptures qui ont conduit certains chercheurs à dire qu’il s’agissait d’instruments d’un culte du soleil. Sur certains, on trouve en effet une figure en cercle sculptée ; sur d’autres, on trouve des bassins circulaires sculptés; sur d’autres des bassins ovalaires. Ces éléments ont été interprétés comme des représentations d’éléments impliqués dans le culte solaire comme le disque solaire ou des bassins cultuels. Cette hypothèse reste toutefois loin d’être admise par tous. Nouveau quid d’un rapport avec des symboles et un culte égyptien?

mégalithes de sénégambie
Crédit Photo : Adrien Delvoye

Bien qu’il soit largement admis que les sites incluant les mégalithes soient des  lieux d’inhumation,  la nature de celle-ci semble assez variable. Comme dans d’autres endroits en Afrique, il est possible que des morts d’un certain statut, sans traitement de leurs restes aient été  enterrés, avant d’être suivis de leurs serviteurs ou de leurs dépendances.

Long semble encore le chemin de la redécouverte de cette brillante civilisation multi-millénaire  qui ne demande, comme un ancien dans un village, qu’à raconter les histoires de ceux qui nous ont légué notre terre.

Pour en savoir plus

Les traditions mégalithiques de Sénégambie  / Augustin Holl & Hamadi Bocoum

Le Sahara ou La vallée du Nil ? : sur la problématique du berceau de l’unité culturelle de l’Afrique noire / Aboubacry Moussa Lam

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