Dans une interview accordée à l’animatrice Oprah Winfrey, le rappeur et producteur américain Jay-Z a déclaré que mis à part Martin Luther King, dont le rêve s’est réalisé avec l’élection à la présidence américaine de Barack Obama, le hip-hop avait fait plus que les ‘icônes culturelles’ dans la lutte pour améliorer les relations entre les races.
Par Sandro CAPO CHICHI / nofi.fr
Dans le cadre de la célébration du 50ème anniversaire de la marche de Selma entamée par Martin Luther King, Jay-Z s’est exprimé dans l’émission Oprah’s Masterclass au sujet de l’impact positif du hip-hop dans les relations entre les races :
(…)Je pense que le hip-hop a fait plus pour les relations entre les races que la plupart des icônes culturelles. Mis à part Martin Luther King, parce que nous avons réalisé son ‘rêve’ lorsque le Président Obama a été élu. Cependant, l’impact de la musique, vous savez, cette musique n’a pas simplement influencé les enfants des quartiers. Elle a influencé des gens dans le monde entier. (…) Le racisme est enseigné à la maison.Je pense vraiment que le racisme est enseigné lorsqu’on est jeune. Il est très difficile d’enseigner le racisme quand votre enfant écoute Snoop Doggy Dogg. Avant les gens dansaient dans des clubs différents. Il y avait des clubs de hip-hop et des clubs de techno. Aujourd’hui les gens font la fête ensemble et depuis que l’on a des gens qui font la fête, qui dansent et chantent sur la même musique, les conversations suivent naturellement après ça. Et dans ces conversations, on réalise qu’on est plus similaires que différents.
Qu’en pensons-nous? Que se flatter du fait que des gens d’autres origines s’identifie à notre culture a souvent des inconvénients. On a tendance, pour continuer à faire mousser son ego, à donner plus facilement accès à des artistes d’origines extérieures à notre culture. Cet accès clés en main se fait souvent au détriment de personnes originaires de la communauté où est née la culture. S’en suit alors un sentiment d’injustice et des tensions communautaires. C’est exactement le processus qui a récemment entraîné l’affaire Azealia Banks / Iggy Azalea.
Certes, les Afro-Américains ont culturellement fait beaucoup pour donner envie aux autres peuples de s’identifier à eux. Mais cette identification et cette admiration ne sont souvent qu’une partie d’un processus qui conduit souvent à un durcissement de relations qui évoluent à leur tour vers de nouvelles tensions.
En proclamant ‘égaux’ Noirs et Blancs dans la pratique du Hip-Hop, en en faisant un art quasi-universel et non une tradition culturelle difficile d’accès, on banalise ses racines pour la rendre semblable à un simple sport. Le football, le tennis ou la boxe sont anglais à l’origine, mais sont aujourd’hui des sports devenus universels dans l’inconscient collectif. Voir des jeunes de toutes les couleurs participer au même sport peut être ‘mignon’ et ‘Peace & Love’ dans un premier temps mais cela n’empêche pas l’utilisation de ces mêmes sports pour servir des causes idéologiques voire racistes. Quels racistes ne se sont pas félicités que leur ‘race’ domine un sport ou une discipline? Combien de fois des événements sportifs ont été -publiquement ou en coulisse- instrumentalisés pour prouver la supériorité d’un peuple sur un autre? Le Hip-Hop améliore peut-être les relations entre les ‘races’ aux Etats-Unis et dans le monde, mais pour combien de temps encore?