La légende de la dynastie salomonide d’Ethiopie‏

En 1270, le roi de shewa Yekuno Amlak défaisait les forces du dernier roi de la dynastie zagwé. Il menait alors au pouvoir la dynastie dite ‘salomonide’ en ce qu’elle descendait de l’ancien roi Ménélik, issu  de l’union du roi Salomon d’Israel et de la Reine de Saba. Usurpateur, cette ascendance glorieuse lui permettait de se légitimer auprès du peuple et du puissant clergé. Cette dynastie allait régner sur l’Abyssinie jusqu’au 20ème siècle, période de la chute de l’empereur l’Hailé Sélassié. Les sources sur sa vie nous proviennent de textes médiévaux et de traditions orales.

Par Sandro CAPO CHICHI / Nofipédia

Origines de la dynastie salomonide

Yekuno Amlak, dont le nom signifie ‘Il régnera’ serait  le fils de la servante d’un riche marchand d’ethnie amhara, dont le contact lui aurait permis de monter plus facilement en rang dans la société. Peut-être baptisé sous le nom de Tesfa Yesus (L’espoir de Jésus) il aurait étudié à Hayq où il se serait lié d’amitié avec le religieux  Iyasus Mo’a, qui allait plus tard le soutenir dans sa lutte contre la dynastie des Zagwés. Selon d’autres traditions, ce serait le fameux religieux Hakla Haymanot qui l’aurait éduqué et lui aurait permis de vaincre les Zagwés. Lorsque ces derniers entrèrent en conflit avec la région du Shewa, Yekuno aurait été emprisonné par le roi d’alors, appelé Yitbarek avant de s’échapper et de créer un nouvel état dans le Shewa.

Yekuno Amlak
Yekuno Amlak

Il aurait lancé une révolte générale contre Yitbarek qu’il aurait tué, selon certaines traditions, personnellement devant l’autel  du monastère de Gayint. C’est la fin de la dynastie des Zagwés dont la mémoire et les accomplissements  seront particulièrement assombris par ses successeurs.

Consolidation du pouvoir

Yekuno Amlak doit alors faire face à un grand élan contestataire dans son territoire, notamment auprès du puissant clergé. Certes,  il est un Amhara et non un Agaw comme l’était la dynastie régnante d’Axoum, mais il est aussi un usurpateur dont les armées ont conquis le pouvoir avec une grande brutalité. Pour ce faire, il a mis en évidence, peut-être même créé, plusieurs événements historiques tournant sa légitimité traditionnelle à son avantage. Le premier est celui de son ascendance paternelle à partir du dernier roi d’Axoum, Dil Na’od. Il ne serait ainsi pas un usurpateur du pouvoir royal mais plutôt son restaurateur. Il ne fait que rétablir la lignée qui aurait  inaugurée par Ménélik, le premier roi d’Abyssinie, fils de la reine de Saba (appelée Makeda dans les traditions abyssiniennes) et du roi Salomon d’Israel. La légende, inconnue des textes avant Yekuno Amlak, voudrait que Makeda ait voyagé au royaume d’Israel pour se familiariser avec l’art de la politique.

solomonide
La reine de Saba par Mekbib Geberstadik

Sur place, Salomon aurait abusé d’elle, de cette union naissant plus tard Ménélik. Salomon aurait ensuite eu un rêve ou Dieu lui annonçait que le nouvel ordre allait être incarné par l’enfant dans le ventre de Makéda. Ayant grandi, Ménélik se rendit en Israel à la cour de son père, où des membres de sa suite volèrent l’Arche d’Alliance qu’ils apportèrent en Abyssinie avec l’accord de Dieu qui leur permit de traverser miraculeusement la Mer Rouge. Ménélik était désormais le successeur de Salomon choisi par Dieu. Les Abyssins sont eux  le peuple élu.

 

Entretenant de bonnes relations avec les musulmans, notamment ceux d’Ifat dans le Shewa, il demande aussi par une lettre au Sultan ottoman, comme le voulait la tradition, un évêque pour l’église abyssinienne provenant d’Alexandrie en Egypte. Toutefois, n’ayant pas reçu de réponse, il accuse le souverain yémenite d’avoir intercepté le courrier.

Yekuno mènera ensuite plusieurs guerres contre le royaume païen de Damot au sud-ouest sans toutefois parvenir à le pacifier.  Roi pieux, Yekuno fait tailler une église dans la roche à Genneta Mariam à l’Est de la ville de Lalibela.

Fresques de l'église d Genata Mariam, Photo http://patenvadrouille.over-blog.com/
Fresques de l’église d Genata Mariam, Photo http://patenvadrouille.over-blog.com/

Celle-ci renferme les premières peintures murales connues de l’histoire de l’Ethiopie. Yekuno meurt en 1285 et est remplacé sur le trône par son fils, qu’il avait nommé, comme son ancêtre, Salomon et qui régnera sous le nom de Yigba Tseyon « Faites entrer Zion ». C’était le début, ou peut-être la Renaissance salomonide qui allait faire résonner dans le monde noir la primauté des Ethiopiens, puis des Noirs comme peuple élu jusqu à  Hailé Sélassié, Marcus Garvey et Bob Marley en passant par Ménélik II.

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