Après la chute de l’empire d’Axoum à la fin du 1er millénaire après notre ère notamment sous les coups des populations agaw menés par une reine semi-légendaire appelée Gudit, ces dernières populations vont progressivement conquérir le pouvoir impérial d’Aksoum et le transférer à la ville d’Adefa, pour y établir une nouvelle capitale et une nouvelle dynastie, celle des Zagwe (1150- 1270). Bien que cette dynastie n’ait pas connu l’unification du pays qu’elle connaîtra par la suite, elle fut à l’origine de remarquables achèvements dont les onze célèbres églises taillées à travers le roc de Lalibela.
Par Sandro Capo Chichi
Origines
Alors que l’autrefois puissant empire d’Axoum s’effondrait sous la pression de populations comme les Agaw, son gouvernement parvenait paradoxalement à se maintenir grâce à l’aide d’officiers agaw, qui se voyaient au fur et à mesure intégrés dans la culture ‘sémitique’ des empereurs d’Axoum.
Entre temps, l’économie ravagée d’Axoum s’était améliorée, notamment grâce à son ouverture à des échanges internationaux orientés vers les îles Dahlak au Yémen via le port d’Adoulis. Vers 1150, un Agaw originaire de la région de Lasta, allait créer la dynastie des Zagwés, nom qui signifie peut-être la ‘dynastie des Agaw’ en ge’ez, langue des élites d’Axoum.
Le règne
Les Zagwe réorganisèrent l’état hérité d’Axoum d’un point de vue idéologique, politique et économique. Idéologique tout d’abord, bien qu’ils soient très pieux, les rois zagwés ne sont pas reconnus comme légitimes par les membres de l’église orthodoxe d’Axoum. Pour y faire face, ils créent un mythe de leur descendance à partir de Moïse.
Ils font de plus la promotion du christianisme en adoptant une politique consistant à mettre en place des élites quasi exclusivement de foi chrétienne. Le pouvoir zagwé s’attache aussi à organiser des pèlerinages jusqu’ en Palestine. Plus tard, à la fois pour lutter contre la difficulté d’organiser des pèlerinages de plus en plus coûteux en Terre Sainte et affirmer la primauté de la nouvelle dynastie sur celle d’Axoum, le plus grand roi zagwé, Lalibela (1185-1225) décida de faire de sa capitale Roha une nouvelle Jérusalem.
Onze églises taillées à travers le roc dont la plus célèbre est celle de Bet Giorgis sont ainsi construites, en une nuit par des anges, selon la légende. Bien que le style de ces églises soit typiquement ‘abyssin’, Lalibela aurait recruté à cette fin des artisans d’Egypte et de Palestine.
Sous le règne de ce roi, qui donnera plus tard son nom à sa capitale de Roha, le royaume était séparé en plusieurs fiefs qu’il allait visiter chaque ans pour s’enquérir de la situation sur place, juger les conflits sur place et lever des denrées pour se nourrir lui et sa cour.
Alors que depuis la période d’Axoum, l’église était dirigée par un évêque originaire d’Egypte, les Zagwe poursuivirent leur politique d’éthiopianisation en cherchant déposer l’un de ces évêques, sans succès toutefois.
Les réformes des Zagwés se manifestèrent aussi d’un point de vue militaire avec une plus grande attention apportée à l’armée. Ce choix permit à la nouvelle dynastie de conquérir de nouveaux territoires au sud du lac Tana et du plateau du Shewa. Les captifs de ces derniers territoires allaient faire du royaume un important fournisseur d’esclaves et le premier fournisseur en myrrhe et en frankincense au monde arabe, deux sources importantes sources de richesse de la dynastie zagwé.
Au 13ème siècle, vers 1275, les Zagwé entrèrent en guerre contre un royaume situé dans la région du Shewa et dirigé par Yekuno Amlak. Après plusieurs défaites, l’empereur Zagwé se fit tuer par Yekuno Amlak, mettant fin à la dynastie des Zagwé et inaugurant celle des Solomonides.
Références:
A history of Ethiopia / Harold G. Marcus
Land and society in the Christian kingdom of Ethiopia : from the thirteenth to the twentieth century, Donald Crummey
https://www.nofi.media/2018/02/tewodros-ii/1340