Longtemps avant la Fête des mères ou autre Journée de la femme, des peuples yorubas du Bénin et du Nigeria ont élaboré le Gelede, une cérémonie d’hommage et d’apaisement des « mères » de la communauté. Le contentement de ces dernières étant indispensable à l’harmonie sociale, le Gelede est un phénomène traditionnellement important.
Origines du Gelede
La plupart des traditions historiques font remonter les origines du Gelede (prononcer guèlèdè) à l’ancien royaume yoruba de Kétou, dans l’actuelle République du Bénin. A Kétou même toutefois, on explique généralement qu’un prince de Kétou aurait quitté ses terres suite à une querelle dynastique et se serait établi dans la petite ville d’Ilobi dans l’actuel Nigeria. Là-bas, il aurait créé le Gelede, puis serait ensuite retourné enseigner cette tradition aux habitants de Kétou.
La création du Gelede remonterait à la fin du IXXe ou au début du XVIIIe siècle. Kétou est toutefois considéré comme le berceau de la cérémonie gelede, car ses cérémonies y sont aujourd’hui les plus riches et les plus élaborées. Le Gelede, qui ne se trouve en majorité que chez les Yorubas de l’Ouest (proches de la frontière Nigeria-Bénin), s’est toutefois répandu chez des populations voisines comme les Fon du Bénin ou les Ijo du Nigeria.
Les mythes expliquant l’origine de la cérémonie sont divers, mais font généralement référence à un ancêtre féminin primordial qui, ne pouvant pas avoir d’enfants, sollicita l’oracle Ifa, qui lui recommanda de pratiquer ce qui deviendra le Gelede. Cette proposition fut un succès et se transmit de génération en génération.
Le contexte
Autrefois organisées lors de la saison sèche, les cérémonies gelede le sont aujourd’hui sur commande à toute période de l’année. Leur but est de répondre à des problèmes individuels, familiaux ou sociétaux tels que la maladie, la stérilité, la malchance, la mort. Pour ce faire sont organisées des chants, compositions musicales et danses effectuées par des danseurs masqués. Elles sont destinées à apaiser les femmes âgées du groupe, à endiguer leur mauvaise humeur, leur bienveillance et leur dynamisme étant indispensable au bon fonctionnement et à l’harmonie de la société.
La préparation
Les anciens des familles souhaitant une cérémonie consultent l’oracle ifa qui indique quels masques choisir. Puis ils prennent rendez-vous avec les responsables de la société Gelede qui choisit chants, danses et costumes.
La tenue des gelede est constituée d’étoffes, de chaussons, de chevillères et de masques. Ces derniers, sculptures en bois posées sur la tête du danseur, sont préparés et peints par des sculpteurs appartenant à la société gelede. Le dessus de ces masques peut être composé d’une scène sculptée ou d’une simple coiffure. Le visage, réalisé à partir de mêmes critères, avec des yeux globuleux percés de trous, un nez avec des narines arrondies, une bouche charnue et des scarifications, est parfois accompagné d’un masque de corps représentant les seins de la femme. Alors que les hommes sont les seuls danseurs et que le Babalashe, responsable des masques peints, l’est aussi, c’est une femme, l’Iyalashe, qui dirige la cérémonie en général. Les personnages représentés par des danseurs sont en majorité des femmes.
Le déroulement
La performance s’articule autour de l’apparition du masque d’Efe. Avant son apparition, défilent parfois des masques associés à des divinités du panthéon yoruba, mais toujours de chants incantatoires destinés à faire effet sur l’humeur des mères de la communauté. Juste avant Efe se produit le premier masque chanteur, Tetede. Il représente sa jumelle ou son épouse, selon les traditions.
Avant l’apparition d’Efe, une femme âgée représente la famille qui a commandé la cérémonie, puis une jeune fille portant une calebasse où se trouve un oiseau qui, lui, représente la capacité des mères à se transformer en oiseaux malfaisants de nuit si elles ne sont pas apaisées. Chants, contes, blagues accompagnent la prestation endiablée du masque d’Efe qui s’achève avec un chant d’adieu annonçant le retour d’Efe chez les ancêtres. Les femmes, surtout âgées, les mères de la communauté, dont la supériorité spirituelle est apaisée, peuvent alors rejaillir positivement sur la communauté jusqu’à ce qu’un nouveau malheur ne l’exige.