Femme et D.G. d’une compagnie aérienne africaine: rencontre avec Fatima Beyina-Moussa

Le 8 mars dernier, le monde célébrait la journée internationale de la femme. Afin de marquer symboliquement cet événement, la compagnie aérienne nationale du Congo EcAir (Equatorial Congo Airlines) a opté pour une inititative originale : organiser une exposition dédiée aux femmes africaines qui ont marqué l’Histoire par leur courage et leur talent.

 Par Fashizblack

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De Myriam Makeba à Francine Ntoumi, les portraits de ces femmes exceptionnelles sont exposés gratuitement dans le hall des arrivées du tout nouvel aéroport de Brazzaville. Cette exposition, intitulée « Héroïnes et femmes africaines d’exception » revêt un caractère particulier, et pour cause : la compagnie EcAir est dirigée par une femme, un fait encore rare sur le continent africain. Fatima Beyina-Moussa, 41 ans et mère de 2 enfants, a accepté de répondre à nos questions durant le vernissage de l’événement. Elle revient sur son parcours, son approche du management et comment elle équilibre vie familiale et vie professionnelle.

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Bonjour Mme Beyina-Moussa et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Une exposition sur les femmes africaines d’exception fait plutôt écho à votre parcours. Quel était votre projet professionnel initial ? Pourriez-vous nous en dire plus ?
Je ne projetais absolument pas de devenir Directrice Générale d’une compagnie aérienne. J’ai plutôt un profil d’économiste. J’ai commencé ma carrière à 26 ans, en intégrant le cabinet d’audit Ernst & Young. Par la suite, j’ai été travailler à la Banque des Etats d’Afrique Centrale, au Programme des Nations Unies pour le Développement.. avant d’intégrer le cabinet du ministère des finances congolais. J’ai participé à la création de la compagnie aérienne nationale et lorsqu’il a fallu sélectionner une personne pour la diriger, j’ai été choisie.
Puisque vous avez participé à la création de la société, quels en étaient les principaux objectifs ? Surtout à la lumière des difficultés qu’ont connues les précédentes compagnies aériennes congolaises…
La création d’ECair rentre dans le cadre d’un projet plus global, qui est celui de faire de Brazzaville, un hub régional en Afrique Centrale. Nous souhaitons développer les liaisons dans la zone CEMAC et en Afrique de l’Ouest, en priorité. Comme vous l’avez évoqué dans votre question, les compagnies aériennes congolaises souffrent d’un déficit de confiance.. Raison pour laquelle nous souhaitons vraiment nous focaliser sur la qualité de service, notamment en s’alignant sur les standards de qualité internationaux. Par exemple, nous nous sommes associés à des références dans le domaine aérien comme Lufthansa ou Privatair.

Parlant de standards de qualité internationaux et de critères justement, avez-vous délibérément imposé une stricte application de la parité lors de vos recrutements ?
En termes de critères, nous avons fait le choix de mettre en avant la jeunesse du Congo. Nous embauchons sur la base des diplômes, du potentiel, de la détermination des candidats. Mon approche est la suivante : il est mieux de parier sur des jeunes qui n’ont pas un parcours professionnel très fourni. Cela nous permet de les faire grandir au sein de la société, leur inculquer nos valeurs. En matière de parité, nous ne faisons pas de discrimination positive. Cependant, notre personnel navigant est souvent constitué de femmes, pour des raisons évidentes. Nous essayons tout de même de ne pas cantonner le personnel féminin à des postes d’hôtesses. On les encourage à devenir pilotes et à faire des métiers techniques que l’on croit exclusivement réservés aux hommes.

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Cela fait encore référence à votre propre poste actuel. Dans l’inconscient collectif, on n’imagine pas la direction d’une compagnie aérienne confiée à une femme, encore moins de votre âge. Est-ce que vous avez dû concevoir une manière de manager au féminin ?
Je ne pense pas qu’il y ait de management au féminin. Lorsque vous dirigez une entreprise, les contraintes sont les mêmes, que vous soyez un homme ou une femme. Vous avez des objectifs à atteindre, des obstacles à surmonter. Mais bien sûr, il y a des situations dans lesquelles la sensibilité féminine s’exprime plus. Je ne me suis jamais posée la question des difficultés que j’aurais à surmonter parce que je suis une femme africaine. J’ai fait des études de finances, j’ai pu jusqu’ici avoir un parcours diversifié, et je pense que les femmes devraient ne plus s’autocensurer. A notre époque, on peut OSER !

L’exposition que vous avez décidé de mettre en place est donc une matérialisation de votre philosophie en somme ?
A vrai dire, le plus drôle est que l’idée de cette exposition est venue d’un homme travaillant dans notre société. Nous avons constaté qu’un certain nombre de grandes femmes africaines étaient complètement méconnues du grand public, parfois même dans leurs propres pays. Cela est surtout lié au fait que les africains de manière générale connaissent parfois très mal ou très peu leur histoire. Cette exposition est donc une occasion pour nous de rendre justice à ces femmes, afin qu’elles en inspirent d’autres.

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A ce sujet, observez-vous que les femmes congolaises aient encore des difficultés à équilibrer leurs vies familiales et leurs ambitions professionnelles, ce qui peut limiter leurs aspirations ?
Vous savez, les femmes congolaises sont mères et travaillent. Je n’ai pas observé de pression sociale particulière et à titre personnel, je n’en ai pas subi. Je suis rentrée au Congo car mon époux avait été affecté et puis un concours de circonstances a également aidé au retour. Une fois ici, j’ai su très facilement m’adapter.

Comment parvenez-vous justement à diriger une aussi grande entreprise et à être présente pour votre famille ?
Cela tient en un mot : ORGANISATION. Il m’arrive d’être en pleine réunion de travail, puis d’avoir la babysitter de mon fils au téléphone en même temps.

Votre personnel est très compréhensif…
Ils n’ont pas le choix (rires) !
L’exposition « Héroïnes et Femmes africaines d’exception » court jusqu’au 31 mars 2014 au sein de l’aéroport international Maya-Maya de Brazzaville, Congo.
Site web: http://www.flyecair.com

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